🟦 Décret du 5 janvier 2022 portant dissolution de deux associations l’« association allonnaise pour le Juste Milieu » et l’association « Al Qalam »

Références

NOR : INTD2200156D
ELI : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2022/1/5/INTD2200156D/jo/texte
Source : JORF n°0004 du 6 janvier 2022, texte n° 15

En-tête

Le Président de la République,
Sur le rapport du Premier ministre et du ministre de l’intérieur,
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 10 et 11 ;
Vu le code des relations entre le public et l’administration, notamment ses articles L. 121-1 et L. 121-2 ;
Vu le code de la sécurité intérieure, notamment les 6° et 7° de l’article L. 212-1 et l’article L. 212-1-1 ;
Vu le courrier du 12 décembre 2021, notifié par voie administrative le 20 décembre 2021, par lequel A, président de l’« association allonnaise pour le Juste Milieu » (AAJM) et de l’association « Al Qalam » a été, d’une part, informé de l’intention du Gouvernement de procéder à la dissolution de ces associations et, d’autre part, invité à présenter ses observations dans un délai de dix jours à compter de cette notification ;
Vu le courrier en date du 28 décembre 2021 par lequel l’« association allonnaise pour le Juste Milieu » et l’association « Al Qalam » ont fait valoir leurs observations écrites ;

Considérants

Considérant qu’aux termes de l’article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure : « Sont dissous, par décret en conseil des ministres, toutes les associations ou groupements de fait : […] 6° Ou qui, soit provoquent ou contribuent par leurs agissements à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine, de leur sexe, de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une religion déterminée, soit propagent des idées ou théories tendant à justifier ou encourager cette discrimination, cette haine ou cette violence ; 7° Ou qui se livrent, sur le territoire français ou à partir de ce territoire, à des agissements en vue de provoquer des actes de terrorisme en France ou à l’étranger » ; qu’aux termes de l’article L. 212-1-1 du même code, « Pour l’application de l’article L. 212-1, sont imputables à une association ou à un groupement de fait les agissements mentionnés au même article L. 212-1 commis par un ou plusieurs de leurs membres agissant en cette qualité ou directement liés aux activités de l’association ou du groupement, dès lors que leurs dirigeants, bien qu’informés de ces agissements, se sont abstenus de prendre les mesures nécessaires pour les faire cesser, compte tenu des moyens dont ils disposaient » ;

Considérant que « l’association allonnaise pour le Juste Milieu » et l’association « Al Qalam », dont A est le président, et B le vice-président, gèrent un lieu de culte dénommé la « mosquée d’Allonnes » à Allonnes (72), accueillant environ 300 fidèles et abritant également une école coranique accueillant environ 110 enfants ; que sous couvert de leur objet social respectif, ces associations promeuvent en réalité, à travers les actes et positions de leurs dirigeants, de leurs principaux membres actifs ainsi que des personnes officiant au sein de la mosquée d’Allonnes et de l’école coranique, une pratique radicale de l’islam, légitiment le recours au djihad armé, la mort en martyr ainsi que l’instauration de la charia, et contribuent ainsi à la permanence d’une idéologie islamiste radicale et à la diffusion de thèses pro-djihadistes ; que pour l’ensemble de ces raisons, le lieu de culte a fait l’objet d’une mesure de fermeture, sur le fondement de l’article L. 227-1 du code de la sécurité intérieure par arrêté du 25 octobre 2021 ;

Considérant en premier lieu que les associations « AAJM » et « Al Qalam » ainsi que les imams officiant à la mosquée d’Allonnes promeuvent une pratique radicale de l’islam, légitimant le recours au djihad armé, la mort en martyr ainsi que l’instauration de la charia ; qu’ainsi, C, principal imam de la mosquée gérée par ces associations, effectuait des prêches dans lesquels il a qualifié les non-croyants d’ennemis de l’islam ou « d’animaux » qui iront en enfer ; qu’il y justifiait régulièrement l’instauration de la charia pour mettre fin à l’humiliation des musulmans et la transformer en force ; qu’en juillet 2021, il a valorisé le jeûne lors d’une fête musulmane en l’érigeant au même niveau de sacrifice que le djihad et la mort en martyr ; que de même, le vice-président des associations susmentionnées et imam occasionnel a, lors d’un prêche tenu en avril 2021, comparé le Ramadan au djihad, en exhortant Allah de donner la victoire à ceux qui lui obéissent ; qu’il a conclu l’un de ses prêches en demandant « à Dieu d’humilier les mécréants ennemis de l’islam et des musulmans et de donner la victoire aux musulmans » ;

Considérant en deuxième lieu que les associations « AAJM » et « Al Qalam », leurs dirigeants et leurs principaux membres actifs ainsi que les personnes officiant au sein de la mosquée d’Allonnes légitiment les attentats terroristes ; qu’il en a été ainsi en septembre 2020, après la réitération de la publication des caricatures de Mahomet par le journal Charlie Hebdo, B ayant réuni des jeunes à la mosquée en indiquant : « Ces gens méritent la mort, mais nous ne sommes pas en position de force » ; qu’il en a été ainsi également à la suite de l’assassinat, en octobre 2020, de Samuel PATY à Rambouillet (78), les dirigeants et imams de la mosquée s’étant réjouis en érigeant l’auteur de l’attentat en martyr ; que de même, D, ancien responsable de l’enseignement coranique au sein des associations a déclaré que celui qui se moquait du prophète devait mourir ; que lors de ces attentats, le président des associations et les imams ont demandé aux membres des bureaux des associations et aux imams officiant au sein de la mosquée d’user de la « taqiya » (dissimulation) en acceptant de se rendre dans une église et de « rencontrer les kouffars » afin d’afficher facticement leur soutien ; que le président de ces associations gestionnaires du lieu de culte a insisté sur le fait de mobiliser la jeunesse qui représente à leurs yeux la relève pour le combat à mener jusqu’à la victoire finale en les sensibilisant au fait qu’ils sont eux-mêmes « victimes d’islamophobie d’Etat », en indiquant aux jeunes fidèles qu’il fallait « impérativement se renforcer dans [leur] foi et se préparer au combat » quitte à les rétribuer ; que ces consignes ont été réitérées en avril 2021 ;
Considérant en quatrième lieu que la visite domiciliaire réalisée le 12 octobre 2021 dans les bâtiments abritant le lieu de culte a permis la découverte de plusieurs ouvrages mis à disposition des fidèles justifiant le jihad armé, promouvant la discrimination à l’égard des femmes, relayant des propos hostiles aux juifs, aux chrétiens et aux non-musulmans, la lapidation des auteurs d’adultère et la mise à mort des apostats et des homosexuels ;

Considérant en cinquième lieu que les associations « AAJM » et « Al Qalam », leurs dirigeants, leurs principaux membres actifs ainsi que les personnes officiant au sein de la mosquée entretiennent également des relations avec des individus appartenant à la mouvance islamiste radicale et acquis aux thèses pro-djihadistes ; qu’ainsi, F, imam au sein de la mosquée d’Allonnes entre 2011 et 2016 et toujours membre de l’association, se prévaut de sa rencontre, à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis (91), avec le terroriste islamiste G, condamné à plusieurs reprises pour des faits liés au terrorisme ; que de même, l’association invite des conférenciers incarnant un islam radical et propageant la doctrine salafiste ; que la diffusion de telles théories a attiré la fréquentation d’individus appartenant à la mouvance islamiste radicale légitimant les attentats, effectuant du prosélytisme aux abords de la mosquée, tenant des propos antisémites et incitant à la commission d’acte de terrorisme ; qu’ainsi, après les attentats de Charlie Hebdo en 2015, un fidèle de la mosquée a réuni les enfants à la mosquée et a déclaré : « Ne respectez pas les minutes de silence et remerciez Dieu qui a vengé le prophète » ; qu’en novembre 2020, à la suite des deux attentats d’octobre 2020, un autre fidèle de la mosquée a affirmé : « Les attentats étaient des signes forts contre la France et les Français qui enfin comprennent que nous sommes armés et prêts à faire la guerre » ; qu’un autre a déclaré souhaiter partir en Syrie faire le djihad ; que plusieurs fidèles fréquentant la mosquée ont fait l’objet de procédures pénales pour apologie du terrorisme ; qu’enfin, en avril dernier, un autre fidèle a affirmé que l’attentat de Rambouillet (78) renforçait « sa détermination » ; que ces propos n’ont été ni modérés, ni condamnés par les responsables de l’association gestionnaires de la mosquée mais au contraire applaudis ;

Considérant que l’ensemble des actes et prises de position, qu’ils émanent des dirigeants de l’« AAJM » et de l’association « Al Qalam », de leurs principaux membres actifs ainsi que des personnes officiant au sein de la mosquée d’Allonnes et de l’école coranique gérées par ces associations, doivent être regardés comme formant un tout révélateur des intentions de ces associations ; que dès lors, les déclarations et actes auxquels l’ensemble de ces personnes se livrent, qui n’ont été ni modérées, ni condamnées par ces associations, doivent leur être imputés ; que ces agissements entrent dans le champ des 6° de l’article L. 212-1 précité, en tant qu’ils incitent à la haine et à la discrimination contre les occidentaux, les juifs, les homosexuels ou les femmes et 7° du même article, en tant qu’ils légitiment, incitent ou provoquent à des actes de terrorisme ;
Le conseil des ministres entendu,
Décrète :

Article 1

L’« association allonnaise pour le Juste Milieu » et l’association « Al Qalam » sont dissoutes.

Article 2

Le Premier ministre et le ministre de l’intérieur sont responsables, chacun en ce qui le concerne, de l’application du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Date et signature(s)

Fait le 5 janvier 2022.

Emmanuel Macron
Par le Président de la République :

Le Premier ministre,
Jean Castex

Le ministre de l’intérieur,
Gérald Darmanin