đŸŸ„ [Interdiction de l’abaya et du qamis] Le Conseil d’État a rejetĂ© le rĂ©fĂ©rĂ© visant Ă  contester l’interdiction du port de l’abaya (ou qamis), au motif que cette interdiction ne constitue pas une atteinte grave et manifestement illĂ©gale Ă  une libertĂ© fondamentale

Références

DĂ©cision : Conseil d’Etat statuant au contentieux
Nature : Ordonnance
Date : 07 septembre 2023
Numéro : 487891
Requérants : Association action droits des musulmans
Source : Lien du communiqué

(…)

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l’article L. 521-2 du code de justice admirllstrative « Suiâ€ș’i d’une demande en ce sens justifiĂ©e par 1’w gence, le juge des rĂ©JĂ©rĂ©s peut ordonner toutes meâ€ș ure.s nĂ©cessaires Ă  la sauvegarde d’une libertĂ© %ndamentale Ă  laquelle une personne moi ale de droil public ou un organisme de droit privĂ© chargĂ© de la gestion d’un service public aurait portĂ©, dans 1’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement fllĂ©gale. (…) ».

Sur les interventions :

2. L’association Jeunesse France HarcĂšlement et l’association La France En Partage ne justifient pas, par leur objet statutaire respectif, d’un intĂ©rĂȘt leur donnant qualitĂ© pour intervenir, pour la premiĂšre, au soutien de la requĂȘte et, pour la seconde, en dĂ©fense. Par suite. leurs interventions sont irrecevables.

Sur la demande en référé

3. L’association Action droits des musulmans demande au juge des rĂ©fĂ©rĂ©s du Conseil d’Etat, statuant sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, de suspendre l’exĂ©cution de la dĂ©cision du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, exprimĂ©e par une note de service relative au respect des valeurs de la RĂ©publique publiĂ©e le 31 aoĂ»t 2023 au bulletin officiel de l’éducation nationale, d’interdire le port de l’abaya et du qamis dans l’enceinte des Ă©tablissements scolaires.

4. Aux termes de 1’article L. 141-5-1 du code de 1’éducation, issu de l’article l er de la loi du 15 mars 2004 encadrant, en application du principe de laĂŻcitĂ©, le port de signes, de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les Ă©coles, collĂšges et lycĂ©es publics : « Dans les Ă©coles, les collĂšges et les lycĂ©es publics, le port de signes ou tenues par lesquels les Ă©lĂšves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit. / Le rĂšglement intĂ©rieur rappelle que la mise en Ɠuvre J’une procĂ©dure disciplinaire est prĂ©cĂ©dĂ©e d’un dialogue avec l’Ă©lĂšve ». Il rĂ©sulte de ces dispositions que, si les Ă©lĂšves des Ă©coles, collĂšges et lycĂ©es publics peuvent porter des signes religleux discrets, sont en revanche interdits, d’une part, les signes ou tenues, tels notamment un voile ou un foulard islamique, une kippa ou une grande croix, dont le port, par lui-mĂȘme, manifeste ostensiblement une appartenance religieuse, d’autre part, ceux dont le port ne manifeste ostensiblement une appartenance religieuse qu’en raison du comportement de l’Ă©lĂšve.

5. Il rĂ©sulte de l’instruction que les signalements d’atteinte Ă  la laĂŻcitĂ© liĂ©s au port de signes ou de tenues mĂ©connaissant les dispositions de l’article L. 141-5-1 du code de l’éducation dans les Ă©tablissements d’enseignement publics ont connu une forte augmentation au cours de l’annĂ©e scolaire 2022-2023, avec 1 984 signalements contre 617 au cours de l’annĂ©e scolaire prĂ©cĂ©dente. Il rĂ©sulte des Ă©lĂ©ments versĂ©s Ă  l’instruction et notamment des indications donnĂ©es lors de l’audience de rĂ©fĂ©rĂ© que ces signalements ont trait, en grande majoritĂ©, au port par des Ă©lĂšves dâ€œĂ©coles, de collĂšges et de lycĂ©es publics de tenues de type abaya, terme dont les reprĂ©sentants de l’administration ont indiquĂ© au cours de l’audience qu’il doit s’entendre d’un vĂȘtement fĂ©minin couvrant l’ensemble du corps Ă  l’exception du visage et des mains, ou qamis, son Ă©quivalent masculin, et que le choix de ces tenues vestimentaires s’inscrit dans une logique d’affirmation religieuse. Le ministre fait Ă  cet Ă©gard valoir que le port de ces vĂȘtements s’accompagne en gĂ©nĂ©ral, notamment au cours du dialogue engagĂ©, en application des dispositions lĂ©gislatives prĂ©citĂ©es, avec les Ă©lĂšves faisant le choix de les porter, d’un discours mettant en avant des motifs liĂ©s Ă  la pratique religieuse, inspirĂ© d’argumentaires diffusĂ©s sur des rĂ©seaux sociaux.

6. Dans ces conditions et en 1’état de l’instruction, il n’apparaĂźt pas qu’en estimant que le port de ce type de vĂȘtements, qui ne peuvent ĂȘtre regardĂ©s comme Ă©tant discrets, constitue une manifestation ostensible de l’appartenance religieuse des Ă©lĂšves concernĂ©s mĂ©connaissant l’interdiction posĂ©e par les dispositions de l’article L. 145-5-1 du code de 1’éducation et en invitant les chefs d’établissement, lorsque l’élĂšve n’y a pas renoncĂ© Ă  1’issue d’une phase de dialogue, Ă  engager une procĂ©dure disciplinaire, le ministre de 1’éducation nationale et de la jeunesse aurait portĂ© une atteinte grave et manifestement illĂ©gale au droit au respect de la vie privĂ©e, Ă  la libertĂ© de culte, au droit Ă  l’éducation et au respect de l’intĂ©rĂȘt supĂ©rieur de l’enfant ou au principe de non-discrimination.

7. Il rĂ©sulte de ce qui prĂ©cĂšde, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la condition d’urgence, que l’association Action droits des musulmans n’est pas fondĂ©e Ă  demander la suspension de l’exĂ©cution de la note de service du 31 aoĂ»t 2023. Sa requĂȘte doit en consĂ©quence ĂȘtre rejetĂ©e, y compris ses conclusions prĂ©sentĂ©es en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E 

Article 1″ : Les interventions des associations Jeunesse France HarcĂšlement et La France L-n Partage ne sont pas admises.

Article 2 : La requĂȘte de l’association Action droits des musulmans est rejetĂ©e.

Article 3 : La prĂ©sente ordonnance sera notifiĂ©e Ă  l’association Action droits des musulmans, au ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, Ă  l’association Jeunesse France HarcĂšlement et Ă  1’association La France En Partage.