đŸŸ„ [Extrait] Technique de l’encerclement : Rejet de la QPC au motif que l’article 1er de la loi du 21 janvier 1995 a pour seul objet de reconnaitre Ă  l’Etat la mission gĂ©nĂ©rale de maintien de l’ordre sans dĂ©finir les conditions et les moyens de son exercice 

1. L’article 1er de la loi du 21 janvier 1995 mentionnĂ©e ci-dessus, dans sa rĂ©daction rĂ©sultant de la loi du 18 mars 2003 mentionnĂ©e ci-dessus, prĂ©voit :
« La sĂ©curitĂ© est un droit fondamental et l’une des conditions de l’exercice des libertĂ©s individuelles et collectives.
« L’État a le devoir d’assurer la sĂ©curitĂ© en veillant, sur l’ensemble du territoire de la RĂ©publique, Ă  la dĂ©fense des institutions et des intĂ©rĂȘts nationaux, au respect des lois, au maintien de la paix et de l’ordre publics, Ă  la protection des personnes et des biens.
« Il associe Ă  la politique de sĂ©curitĂ©, dans le cadre de dispositifs locaux dont la structure est dĂ©finie par dĂ©cret, les collectivitĂ©s territoriales et les Ă©tablissements publics de coopĂ©ration intercommunale ainsi que les reprĂ©sentants des professions, des services et des associations confrontĂ©s aux manifestations de la dĂ©linquance ou Ɠuvrant dans les domaines de la prĂ©vention, de la mĂ©diation, de la lutte contre l’exclusion ou de l’aide aux victimes ».

2. Les requĂ©rants, rejoints par les parties intervenantes, considĂšrent que, faute d’avoir prĂ©vu des garanties suffisantes en cas d’usage par les forces de l’ordre de la technique dite de « l’encerclement », le lĂ©gislateur aurait mĂ©connu l’Ă©tendue de sa compĂ©tence dans une mesure affectant la libertĂ© individuelle, la libertĂ© d’aller et de venir, la libertĂ© de communication et d’expression ainsi que le droit d’expression collective des idĂ©es et des opinions. Selon eux, le lĂ©gislateur aurait dĂ» dĂ©finir les conditions du recours Ă  cette technique de maintien de l’ordre pour assurer la proportionnalitĂ© des atteintes qu’elle est susceptible de porter Ă  ces droits et libertĂ©s. Les requĂ©rants dĂ©noncent Ă©galement, pour les mĂȘmes motifs, la mĂ©connaissance directe, par les dispositions renvoyĂ©es, des mĂȘmes exigences constitutionnelles.

3. Par consĂ©quent, la question prioritaire de constitutionnalitĂ© porte sur les mots « et de l’ordre publics » figurant au deuxiĂšme alinĂ©a de l’article 1er de la loi du 21 janvier 1995.

4. La mĂ©connaissance par le lĂ©gislateur de sa propre compĂ©tence ne peut ĂȘtre invoquĂ©e Ă  l’appui d’une question prioritaire de constitutionnalitĂ© que dans le cas oĂč cette mĂ©connaissance affecte par elle-mĂȘme un droit ou une libertĂ© que la Constitution garantit.

5. L’article 1er de la loi du 21 janvier 1995 Ă©nonce que la sĂ©curitĂ© est un droit fondamental et l’une des conditions de l’exercice des libertĂ©s individuelles et collectives. Selon son deuxiĂšme alinĂ©a, l’État a le devoir de l’assurer sur l’ensemble du territoire de la RĂ©publique. Les dispositions contestĂ©es prĂ©cisent que, dans le cadre de cette mission, l’État doit notamment veiller au maintien de l’ordre public.

6. Ces dispositions lĂ©gislatives ont pour seul objet de reconnaĂźtre Ă  l’État la mission gĂ©nĂ©rale de maintien de l’ordre public. Elles ne dĂ©finissent pas les conditions d’exercice de cette mission et notamment pas les moyens pouvant ĂȘtre utilisĂ©s Ă  cette fin. Il ne peut donc leur ĂȘtre reprochĂ© d’encadrer insuffisamment le recours par l’État, dans le cadre de cette mission, Ă  certains procĂ©dĂ©s de maintien de l’ordre tels que la technique dite de « l’encerclement ».

7. DĂšs lors, le grief tirĂ© de la mĂ©connaissance de l’Ă©tendue de sa compĂ©tence par le lĂ©gislateur dans des conditions affectant par elle-mĂȘme la libertĂ© d’aller et de venir, la libertĂ© individuelle, la libertĂ© d’expression et de communication et le droit d’expression collective des idĂ©es et des opinions ne peut qu’ĂȘtre Ă©cartĂ©. Il en va de mĂȘme des griefs tirĂ©s de la mĂ©connaissance de ces droits ou libertĂ©s.

8. Les mots « et de l’ordre publics » figurant au deuxiĂšme alinĂ©a de l’article 1er de la loi du 21 janvier 1995, qui ne mĂ©connaissent aucun autre droit ou libertĂ© que la Constitution garantit, doivent donc ĂȘtre dĂ©clarĂ©s conformes Ă  la Constitution.

DĂ©cision du Conseil Constitutionnel :

Article 1er. – Les mots « et de l’ordre publics » figurant au deuxiĂšme alinĂ©a de l’article 1er de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative Ă  la sĂ©curitĂ©, dans sa rĂ©daction rĂ©sultant de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sĂ©curitĂ© intĂ©rieure, sont conformes Ă  la Constitution.

Article 2. – Cette dĂ©cision sera publiĂ©e au Journal officiel de la RĂ©publique française et notifiĂ©e dans les conditions prĂ©vues Ă  l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisĂ©e.


Conseil Constitutionnel, QPC, 12 mars 2021, n° 2020-889