đŸŸ„ [Vente immobiliĂšre] L’action en garantie des vices cachĂ©s doit ĂȘtre exercĂ©e dans les deux ans de la dĂ©couverte du vice, sans pouvoir dĂ©passer un dĂ©lai de vingt ans Ă  compter du jour de la vente

Références

Publication : PUBLIÉ AU BULLETIN – PUBLIÉ AUX LETTRES DE CHAMBRE
Identifiant : ECLI:FR:CCASS:2021:C300868
DĂ©cision : Cassation partielle
ArrĂȘt : ArrĂȘt n° 868 FS-B
Mot clé : Vente
Texte appliqué : Articles 1648, alinéa 1er, 2224 et 2232 du code civil.
Source : Cour de cassation, 3e chambre civile, 8 décembre 2021, n° 20-21.439

Faits et procédure

1. Selon l’arrĂȘt attaquĂ© (Riom, 14 janvier 2020), le 13 octobre 2008, Mme [K] et M. [D] ont vendu Ă  M. [Y] une maison avec, attenant Ă  cette habitation, un atelier recouvert d’une toiture en tuiles.

2. Ayant constatĂ© des infiltrations dans l’atelier, ainsi qu’un affaissement de la charpente en bois de la toiture, M. [Y], au vu d’un constat d’huissier de justice du 1er avril 2014, a assignĂ© les vendeurs en rĂ©fĂ©rĂ© expertise, le 16 mars 2015, puis au fond, le 27 septembre 2016, pour obtenir paiement des travaux de rĂ©paration et indemnisation de son prĂ©judice de jouissance sur le fondement de la garantie des vices cachĂ©s.

3. En appel, Mme [K] et M. [D] lui ont opposé la prescription de son action.

Moyens

4. M. [Y] fait grief Ă  l’arrĂȘt de dĂ©clarer son action irrecevable comme prescrite, alors « que le report du point de dĂ©part, la suspension ou l’interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le dĂ©lai de la prescription extinctive au-delĂ  de vingt ans Ă  compter du jour de la naissance du droit, c’est-Ă -dire de la conclusion de la vente dans le cas du dĂ©lai applicable Ă  l’action en garantie des vices cachĂ©s ; qu’en Ă©nonçant, dĂšs lors, pour dĂ©clarer irrecevable, comme prescrite l’action prĂ©sentĂ©e par M. [H] [Y], que la vente litigieuse avait Ă©tĂ© conclue le 13 octobre 2008, que M. [H] [Y] avait saisi le juge des rĂ©fĂ©rĂ©s du tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand aux fins d’obtenir l’organisation d’une mesure d’expertise par un acte d’assignation en date du 13 fĂ©vrier 2015 et que l’action de M. [H] [Y] sur le fondement de l’article 1648 du code civil Ă©tait donc prescrite depuis le 14 octobre 2013, la cour d’appel a violĂ© les dispositions de l’article 2232 du code civil. »

RĂ©ponse de la Cour de cassation

Vu les articles 1648, alinéa 1er, 2224 et 2232 du code civil :

5. Selon le premier de ces textes, l’action rĂ©sultant des vices rĂ©dhibitoires doit ĂȘtre intentĂ©e par l’acquĂ©reur dans un dĂ©lai de deux ans Ă  compter de la dĂ©couverte du vice.

6. Aux termes du deuxiĂšme, les actions personnelles ou mobiliĂšres se prescrivent par cinq ans Ă  compter du jour oĂč le titulaire d’un droit a connu ou aurait dĂ» connaĂźtre les faits lui permettant de l’exercer.

7. Selon le troisiĂšme, le report du point de dĂ©part, la suspension ou l’interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le dĂ©lai de la prescription extinctive au-delĂ  de vingt ans Ă  compter du jour de la naissance du droit.

8. Il est de jurisprudence constante qu’avant la loi du 17 juin 2008 portant rĂ©forme de la prescription en matiĂšre civile, la garantie lĂ©gale des vices cachĂ©s, qui ouvre droit Ă  une action devant ĂȘtre exercĂ©e dans les deux ans de la dĂ©couverte du vice, devait Ă©galement ĂȘtre mise en oeuvre Ă  l’intĂ©rieur du dĂ©lai de prescription extinctive de droit commun.

9. L’article 2224 du code civil, qui a rĂ©duit ce dĂ©lai Ă  cinq ans, en a Ă©galement fixĂ© le point de dĂ©part au jour oĂč le titulaire d’un droit a connu ou aurait dĂ» connaĂźtre les faits lui permettant de l’exercer, ce qui annihile toute possibilitĂ© d’encadrement de l’action en garantie des vices cachĂ©s, le point de dĂ©part de la prescription extinctive du droit Ă  garantie se confondant avec le point de dĂ©part du dĂ©lai pour agir prĂ©vu par l’article 1648 du mĂȘme code, Ă  savoir la dĂ©couverte du vice.

10. En consĂ©quence, l’encadrement dans le temps de l’action en garantie des vices cachĂ©s ne peut ĂȘtre assurĂ©, comme en principe pour toute action personnelle ou mobiliĂšre, que par l’article 2232 du code civil qui Ă©dicte un dĂ©lai butoir de vingt ans Ă  compter de la naissance du droit.

11. Le droit Ă  la garantie des vices cachĂ©s dĂ©coulant de la vente, l’action en garantie des vices cachĂ©s doit donc ĂȘtre exercĂ©e dans les deux ans de la dĂ©couverte du vice, sans pouvoir dĂ©passer un dĂ©lai de vingt ans Ă  compter du jour de la vente (3e Civ., 1er octobre 2020, pourvoi n° 19-16.986, en cours de publication).

12. Pour dĂ©clarer l’action de M. [Y] irrecevable, l’arrĂȘt retient que l’action, qui devait ĂȘtre engagĂ©e dans le dĂ©lai de la prescription applicable Ă  la vente, laquelle Ă©tait intervenue le 13 octobre 2008, Ă©tait prescrite depuis le 13 octobre 2013.

13. En statuant ainsi, la cour d’appel a violĂ© les textes susvisĂ©s.

8. Le moyen n’est donc pas fondĂ©.

Dispositif 

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il dĂ©clare irrecevable l’action de M. [Y] sur le fondement de la garantie des vices cachĂ©s, l’arrĂȘt rendu le 14 janvier 2020, entre les parties, par la cour d’appel de Riom ;

Remet, sur ce point, l’affaire et les parties dans l’Ă©tat oĂč elles se trouvaient avant cet arrĂȘt et les renvoie devant la cour d’appel de Lyon ;

Condamne Mme [K] et M. [D] aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procĂ©dure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur gĂ©nĂ©ral prĂšs la Cour de cassation, le prĂ©sent arrĂȘt sera transmis pour ĂȘtre transcrit en marge ou Ă  la suite de l’arrĂȘt partiellement cassĂ© ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisiÚme chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit décembre deux mille vingt et un.