🟧 DĂ©libĂ©ration CNIL n° 2021-121 du 21 octobre 2021 portant avis sur un projet d’arrĂȘtĂ© modifiant l’arrĂȘtĂ© portant crĂ©ation d’un traitement automatisĂ© de donnĂ©es Ă  caractĂšre personnel dĂ©nommĂ© « SI HonorabilitĂ© »

Références

NOR : CNIX2204034X
Source : JORF n°0045 du 23 février 2022, texte n° 38

En-tĂȘte

La Commission nationale de l’informatique et des libertĂ©s,
Saisie par le ministre des solidaritĂ©s et de la santĂ© d’une demande d’avis concernant un projet d’arrĂȘtĂ© modifiant l’arrĂȘtĂ© du 31 mars 2021 portant crĂ©ation d’un traitement automatisĂ© de donnĂ©es Ă  caractĂšre personnel dĂ©nommĂ© « SI honorabilitĂ© » ;
Vu le rĂšglement (UE) 2016/679 du Parlement europĂ©en et du Conseil du 27 avril 2016 relatif Ă  la protection des personnes physiques Ă  l’Ă©gard du traitement des donnĂ©es Ă  caractĂšre personnel et Ă  la libre circulation de ces donnĂ©es, et abrogeant la directive 95/46/CE (rĂšglement gĂ©nĂ©ral sur la protection des donnĂ©es) ;
Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiĂ©e relative Ă  l’informatique, aux fichiers et aux libertĂ©s ;

DĂ©cision

Sur la proposition de Mme Valérie PEUGEOT, commissaire, et aprÚs avoir entendu les observations de M. Benjamin TOUZANNE, commissaire du Gouvernement,

Emet l’avis suivant :

Sur la finalité du traitement :

Le projet d’arrĂȘtĂ© ajoute une finalitĂ© Ă  l’article 1er de l’arrĂȘtĂ© du 31 mars 2021 afin que le traitement puisse permettre aux personnes habilitĂ©es de procĂ©der Ă  un contrĂŽle de l’inscription ou non au fichier judiciaire national automatisĂ© des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes (FIJAISV) des personnes intervenant auprĂšs de mineurs dans le cadre des activitĂ©s relevant du contrĂŽle des agences rĂ©gionales de santĂ© (ARS).
Selon les prĂ©cisions du ministĂšre, la possibilitĂ© pour les directeurs gĂ©nĂ©raux des ARS de consulter le FIJAISV rĂ©sulte de la combinaison des articles 706-53-7 et R. 53-8-24 du code de procĂ©dure pĂ©nale, et s’inscrit dans le cadre des missions qui leur sont confiĂ©es par l’article L. 1431-2 du code de la santĂ© publique.

Sur les personnes concernées :

Selon les prĂ©cisions du ministĂšre, toute personne ayant des contacts rĂ©guliers avec des mineurs fera l’objet d’un contrĂŽle Ă  court terme. Cela concernerait Ă  la fois les salariĂ©s et les personnels non salariĂ©s, tels que des prestataires et des membres d’associations. Cependant, la Commission relĂšve que ces derniers ne sont pas explicitement visĂ©s par le projet d’arrĂȘtĂ©. En effet, l’article 1er, qui modifie la liste de donnĂ©es pouvant ĂȘtre collectĂ©es afin de requĂȘter le FIJAISV, prĂ©voit la collecte de la nature des professions suivantes : profession mĂ©dicale, pharmacien, auxiliaire mĂ©dical, aide-soignant, ambulancier, n’envisageant donc pas de professions autres, pouvant ĂȘtre exercĂ©es par des salariĂ©s ou des personnes non salariĂ©es. Au vu de la variĂ©tĂ© des professions pouvant entraĂźner une vĂ©rification dans le FIJAISV.
Le ministĂšre envisage d’ajouter au formulaire une catĂ©gorie « autres », qui serait « systĂ©matiquement renseignĂ©e, afin de conserver la possibilitĂ© de connaĂźtre la rĂ©partition des professions contrĂŽlĂ©es ». Si la Commission comprend l’intĂ©rĂȘt de la rĂ©alisation de statistiques concernant les professions contrĂŽlĂ©es, elle rappelle que le ministĂšre a lui-mĂȘme entendu limiter la collecte d’informations relatives aux professions en prĂ©voyant que la sĂ©lection d’une profession dans le systĂšme d’information Ă  l’aide d’un menu dĂ©roulant.
La Commission invite donc le ministĂšre Ă  complĂ©ter la liste des champs dĂ©taillant les professions ou les missions exercĂ©es par les personnes concernĂ©es et Ă  ajouter en dernier recours une catĂ©gorie « autre », sans prĂ©voir d’y associer un champ libre.

Sur les destinataires et les personnes pouvant accéder aux données :

L’article 1er du projet d’arrĂȘtĂ© modifie l’arrĂȘtĂ© du 31 mars 2021 afin que les personnes dĂ©signĂ©es par le directeur de l’Ă©tablissement de santĂ© ou mĂ©dico-social ou, Ă  dĂ©faut, les agents habilitĂ©s des ARS puissent enregistrer les donnĂ©es relatives aux personnes dont l’honorabilitĂ© est contrĂŽlĂ©e par les ARS dans le « SI DĂ©pose », qui permet de requĂȘter le FIJAISV. Selon les prĂ©cisions du ministĂšre, il sera demandĂ© au directeur gĂ©nĂ©ral de l’Ă©tablissement concernĂ© de dĂ©signer un ou deux collaborateurs. Selon les estimations du ministĂšre, les collaborateurs seront pour la plupart membres de l’Ă©quipe de direction, par exemple issus de la direction des ressources humaines. La Commission prend acte de ce que le ministĂšre s’est engagĂ© Ă  s’attacher Ă  ce que les agents concernĂ©s soient en nombre limitĂ© et soient sensibilisĂ©s aux obligations attachĂ©es Ă  cette habilitation.
L’article 1er du projet d’arrĂȘtĂ© modifie Ă©galement l’arrĂȘtĂ© du 31 mars 2021 afin que les agents des ARS habilitĂ©s par le directeur gĂ©nĂ©ral de l’ARS puissent accĂ©der aux donnĂ©es enregistrĂ©es dans le portail « SI Retour ». La Commission relĂšve que seuls ces agents auront accĂšs Ă  ce portail.
Selon les prĂ©cisions du ministĂšre, aucune condition n’est a priori fixĂ©e pour dĂ©terminer la liste des personnes au sein des ARS habilitĂ©es ou dĂ©signĂ©es pour le « SI DĂ©pose » et le « SI retour », en raison notamment de l’absence d’organigramme type de ces agences. La Commission prend acte de ce que le ministĂšre s’est engagĂ© Ă  recommander des profils de personnes pouvant remplir ces missions en fonction de leurs compĂ©tences ou des missions qui leur sont confiĂ©es dans les instructions adressĂ©es aux ARS.
Le III de l’article 4 de l’arrĂȘtĂ© du 31 mars 2021 n’est pas modifiĂ© par le projet d’arrĂȘtĂ©. Ainsi, la liste des personnes destinataires des donnĂ©es enregistrĂ©es dans le portail « SI Retour » mais non habilitĂ©es n’est pas modifiĂ©e. Il n’est donc pas possible pour les agents des ARS qui ont accĂšs aux donnĂ©es de « SI retour » de les communiquer aux directeurs d’Ă©tablissements. La Commission prend acte de ce que le ministĂšre s’est engagĂ© Ă  modifier le projet d’arrĂȘtĂ© sur ce point.

Sur l’information et l’exercice des droits des personnes :

Pour les personnes non salariĂ©es (prestataires, associatifs
), les sociĂ©tĂ©s ou associations seront informĂ©es en amont et seront en charge d’un premier niveau d’information des personnes. La Commission prend acte de ce que le ministĂšre s’est engagĂ© Ă  proposer des documents type d’information Ă  destination de ces acteurs afin de faciliter l’information des personnes.
Sur les droits d’accĂšs, de rectification et d’opposition des personnes :
Les droits des personnes concernĂ©es s’exercent auprĂšs de l’ARS compĂ©tente et, Ă  dĂ©faut, auprĂšs du secrĂ©tariat gĂ©nĂ©ral du ministĂšre de la santĂ©. Ce dernier, qui ne dispose pas d’un accĂšs au FIJAISV, aura pour tĂąche d’assurer la prise en compte des demandes d’exercice des droits par les ARS. La Commission prend acte de ce que le ministĂšre s’est engagĂ© Ă  prĂ©ciser ces Ă©lĂ©ments dans le document d’information destinĂ© aux personnes concernĂ©es.

Sur la sécurité des données et la traçabilité des actions :

L’architecture du « SI HonorabilitĂ© » et ses mesures de sĂ©curitĂ© existantes ont dĂ©jĂ  fait l’objet d’analyses par la Commission et ne prĂ©sentent pas de nouveaux dĂ©veloppements majeurs. L’AIPD ainsi que le plan d’action associĂ© ont Ă©tĂ© mis Ă  jour afin de prendre en compte la nouvelle finalitĂ© du traitement.
La Commission relĂšve que le « SI HonorabilitĂ© » intĂ©grait dĂšs son homologation les mesures de sĂ©curitĂ© permettant de garantir le cloisonnement des donnĂ©es en fonction des diffĂ©rents types d’utilisateurs et de leur domaine d’intervention. Ce mĂ©canisme de cloisonnement sera ainsi rĂ©utilisĂ© pour le contrĂŽle effectuĂ© par les ARS. Elle prend acte de ce que le ministĂšre a rĂ©duit la durĂ©e de conservation des codes retour du FIJAISV conformĂ©ment Ă  ses engagements et de ce que des numĂ©ros d’identification non incrĂ©mentaux ont Ă©tĂ© mis en Ɠuvre afin de rendre plus difficile Ă  un attaquant ou utilisateur malveillant de dĂ©duire des informations concernant les personnes faisant l’objet d’un contrĂŽle d’honorabilitĂ©.
Selon les prĂ©cisions du ministĂšre, le chiffrement des transmissions de donnĂ©es entre le « SI Retour » et les serveurs du ministĂšre de la justice lors de l’envoi et la rĂ©ception automatiques des donnĂ©es liĂ©es Ă  l’interrogation du FIJAISV a de mĂȘme Ă©tĂ© implĂ©mentĂ©. La Commission rappelle que la mise en place de ce chiffrement doit s’accompagner d’une authentification mutuelle entre les serveurs. Elle relĂšve qu’une plateforme sĂ©curisĂ©e pour l’appel aux serveurs gĂ©rant le casier judiciaire est en cours de rĂ©alisation et invite le ministĂšre Ă  prioriser le dĂ©veloppement de cette plateforme.
Les traces techniques seront conservĂ©es pendant une durĂ©e conforme aux recommandations de la Commission. Elle rappelle nĂ©anmoins que la conservation de ces traces doit ĂȘtre assortie Ă  un mĂ©canisme proactif de contrĂŽle automatique, contribuant Ă  la dĂ©tection des comportements anormaux par la gĂ©nĂ©ration d’alertes. Elle rappelle que les traces fonctionnelles doivent de mĂȘme ĂȘtre conservĂ©es pendant une durĂ©e de six mois Ă  un an pour des finalitĂ©s de sĂ©curitĂ© et ĂȘtre adossĂ©es Ă  un mĂ©canisme proactif de contrĂŽle, conformĂ©ment Ă  ses recommandations.

Les autres points du projet d’arrĂȘtĂ© n’appellent pas d’observations de la Commission.

Date et signature(s)

La présidente,
M.-L. Denis