🟩 DĂ©cret du 14 mars 2022 relatif Ă  la mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion

Références

NOR : JUSD2135992D
ELI : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2022/3/14/JUSD2135992D/jo/texte
Alias : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2022/3/14/2022-358/jo/texte
Source : JORF n°0062 du 15 mars 2022, texte n° 18

Informations

Publics concernĂ©s : magistrats, agents de l’administration pĂ©nitentiaire, justiciables.

Objet : fixation des conditions et modalitĂ©s d’application de la mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion.

Entrée en vigueur : le texte entre en vigueur le lendemain de sa publication.

Notice : le dĂ©cret prĂ©cise les modalitĂ©s de mise en Ɠuvre de la mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion prĂ©vue par les articles 706-25-16 Ă  706-25-21 du code de procĂ©dure pĂ©nale.
Il dĂ©termine les conditions dans lesquelles le tribunal de l’application des peines de Paris est saisi par le procureur de la RĂ©publique antiterroriste afin de se prononcer sur la mesure, en prĂ©voyant des dĂ©lais dans lesquels la commission pluridisciplinaire des mesures de sĂ»retĂ© est amenĂ©e Ă  donner son avis prĂ©alable et Ă  faire rĂ©aliser l’Ă©valuation de dangerositĂ© du condamnĂ©.
Il dĂ©finit encore les conditions dans lesquelles s’exerce le suivi de la mesure par le juge de l’application des peines et articule son intervention avec celle du tribunal de l’application des peines de Paris.
Il prĂ©cise le rĂŽle du service pĂ©nitentiaire d’insertion et de probation dans la mise en Ɠuvre de la mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion.
Enfin, il prévoit les conditions du renouvellement de la mesure.

RĂ©fĂ©rences : le dĂ©cret est pris pour l’application des articles 706-25-16 Ă  706-25-21 du code de procĂ©dure pĂ©nale dans leur rĂ©daction rĂ©sultant de l’article 6 de la loi n° 2021-998 du 30 juillet 2021 relative Ă  la prĂ©vention d’actes de terrorisme et au renseignement.
Les dispositions du code de procĂ©dure pĂ©nale, dans sa rĂ©daction rĂ©sultant du dĂ©cret peuvent ĂȘtre consultĂ©es sur le site LĂ©gifrance (https://www.legifrance.gouv.fr).

En-tĂȘte

Le Premier ministre,
Sur le rapport du garde des sceaux, ministre de la justice,
Vu le code de procédure pénale, notamment ses articles 706-25-16 et suivants ;
Vu l’avis du comitĂ© technique de l’administration pĂ©nitentiaire en date du 4 janvier 2022 ;
Vu l’avis du comitĂ© technique des services pĂ©nitentiaires d’insertion et de probation en date du 4 janvier 2022 ;
Le Conseil d’Etat (section de l’intĂ©rieur) entendu,
DĂ©crĂšte :

Article 1

Le titre XV du livre IV du code de procĂ©dure pĂ©nale (deuxiĂšme partie : DĂ©crets en Conseil d’Etat) est ainsi modifiĂ© :
I. – L’article R. 50-54-1 devient l’article R. 50-69 ;
II. – AprĂšs l’article R. 50-69, il est insĂ©rĂ© un chapitre IV ainsi rĂ©digĂ© :

« Chapitre IV
« De la mesure judiciaire de prévention de la récidive terroriste et de réinsertion

« Art. R. 50-70. – Afin d’examiner la situation de la personne condamnĂ©e Ă  une peine pour laquelle la mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion est encourue, le procureur de la RĂ©publique antiterroriste demande au chef d’Ă©tablissement pĂ©nitentiaire et au juge de l’application des peines compĂ©tent pour prendre les dĂ©cisions concernant cette personne de lui transmettre les Ă©lĂ©ments concernant sa situation pĂ©nale, personnelle, sociale et familiale. Les dĂ©cisions et rapports relatifs aux mesures de nature Ă  favoriser la rĂ©insertion dont la personne concernĂ©e a pu bĂ©nĂ©ficier pendant l’exĂ©cution de sa peine lui sont aussi adressĂ©s.

« Art. R. 50-71. – Lorsque la situation de la personne mentionnĂ©e Ă  l’article R. 50-70 lui paraĂźt susceptible de justifier le prononcĂ© d’une mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion le procureur de la RĂ©publique antiterroriste saisit concomitamment la commission pluridisciplinaire des mesures de sĂ»retĂ© mentionnĂ©e Ă  l’article 763-10 compĂ©tente pour le ressort de la cour d’appel de Paris et le tribunal de l’application des peines de Paris. Il en informe le juge de l’application des peines compĂ©tent pour prendre les dĂ©cisions concernant cette personne.
« Le procureur de la RĂ©publique antiterroriste communique au tribunal de l’application des peines de Paris l’ensemble des Ă©lĂ©ments relatifs aux mesures de nature Ă  favoriser la rĂ©insertion dont a Ă©tĂ© mis en mesure de bĂ©nĂ©ficier la personne concernĂ©e pendant l’exĂ©cution de sa peine.

« Art. R. 50-72. – La commission pluridisciplinaire des mesures de sĂ»retĂ© mentionnĂ©e Ă  l’article R. 50-71 procĂšde Ă  l’Ă©valuation de la dangerositĂ© de la personne concernĂ©e et de sa capacitĂ© Ă  se rĂ©insĂ©rer.
« Lorsqu’elle procĂšde Ă  cette Ă©valuation en application du premier alinĂ©a, sa composition est celle prĂ©vue par l’article R. 61-8, complĂ©tĂ©e par :
« 1° Un fonctionnaire de police ou un militaire de la gendarmerie affectĂ© ou ayant Ă©tĂ© affectĂ© dans un service de police judiciaire spĂ©cialement chargĂ© de la lutte contre le terrorisme dĂ©signĂ©, pour une pĂ©riode de cinq ans, par le ministre de l’intĂ©rieur ;
« 2° Un reprĂ©sentant d’une association mentionnĂ©e Ă  l’article 2-9 au titre du reprĂ©sentant d’association d’aide aux victimes prĂ©vue au 6° de l’article R. 61-8. Ce reprĂ©sentant ne peut toutefois avoir Ă©tĂ© victime des faits pour lesquels a Ă©tĂ© condamnĂ©e la personne dont la commission est chargĂ©e d’Ă©valuer la dangerositĂ©.
« Lorsque la commission pluridisciplinaire des mesures de sĂ»retĂ© procĂšde Ă  l’Ă©valuation de la dangerositĂ© d’une personne mineure, le premier prĂ©sident de la cour d’appel dĂ©signe un vice-prĂ©sident de la commission choisi parmi les prĂ©sident ou conseillers de la chambre spĂ©ciale des mineurs de la cour d’appel dans le ressort de laquelle siĂšge la commission. Dans ce cas, la commission est complĂ©tĂ©e par le directeur interrĂ©gional de la protection judiciaire de la jeunesse compĂ©tent dans le ressort de la cour d’appel oĂč siĂšge la commission, ou son reprĂ©sentant.

« Art. R. 50-73. – Le placement de la personne concernĂ©e mentionnĂ© au deuxiĂšme alinĂ©a de l’article 706-25-17 a lieu au centre national d’Ă©valuation de l’administration pĂ©nitentiaire sur demande du prĂ©sident de la commission pluridisciplinaire des mesures de sĂ»retĂ©.
« La durĂ©e du placement, qui ne peut ni ĂȘtre infĂ©rieure Ă  six semaines, ni excĂ©der douze semaines, est dĂ©terminĂ©e par l’administration pĂ©nitentiaire.
« A l’issue du placement de la personne concernĂ©e, le centre national d’Ă©valuation de l’administration pĂ©nitentiaire transmet au prĂ©sident de la commission pluridisciplinaire des mesures de sĂ»retĂ© un rapport d’Ă©valuation pluridisciplinaire de dangerositĂ©. Il communique en mĂȘme temps ce rapport Ă  la personne concernĂ©e.

« Art. R. 50-74. – Sur dĂ©cision de son prĂ©sident, qui en assure la mise en Ɠuvre, la commission pluridisciplinaire des mesures de sĂ»retĂ© peut procĂ©der ou faire procĂ©der sur l’ensemble du territoire national Ă  tous examens, auditions, enquĂȘtes administratives, expertises ou autres mesures utiles.
« La commission peut demander la comparution de la personne condamnĂ©e avant de donner son avis. Cette comparution est de droit si la personne condamnĂ©e en fait la demande. Elle peut ĂȘtre assistĂ©e de son avocat.
« A cette fin, la commission peut Ă©galement utiliser les moyens de tĂ©lĂ©communication audiovisuelle conformĂ©ment aux dispositions de l’article 706-71.
« Cette commission peut consulter les Ă©lĂ©ments figurant dans le dossier individuel du condamnĂ© mentionnĂ© Ă  l’article 724-1.

« Art. R. 50-75. – ConformĂ©ment au troisiĂšme alinĂ©a de l’article 706-25-17, la commission pluridisciplinaire des mesures de sĂ»retĂ© rend un avis motivĂ© sur l’opportunitĂ© de prononcer une mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion au regard la dangerositĂ© de la personne concernĂ©e et de sa capacitĂ© Ă  se rĂ©insĂ©rer. Cet avis est adressĂ© sans dĂ©lai au tribunal de l’application des peines de Paris.

« Art. R. 50-76. – Le tribunal de l’application des peines de Paris saisit le service pĂ©nitentiaire d’insertion et de probation territorialement compĂ©tent au regard du lieu de dĂ©tention de la personne concernĂ©e qui lui communique toute proposition de mesures propres Ă  favoriser la rĂ©insertion de la personne concernĂ©e et l’acquisition des valeurs de la citoyennetĂ©.

« Art. R. 50-77. – La personne concernĂ©e ou son avocat peut se faire dĂ©livrer copie de tout ou partie des piĂšces du dossier de la procĂ©dure conformĂ©ment aux dispositions de l’article R. 165. Le dossier de la procĂ©dure peut Ă©galement ĂȘtre consultĂ© au greffe du tribunal de l’application des peines de Paris.

« Art. R. 50-78. – Lorsque le tribunal d’application des peines ordonne que la prise en charge de la personne soumise Ă  une mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion aura lieu au sein d’un Ă©tablissement d’accueil adaptĂ©, sa dĂ©cision dĂ©signe l’Ă©tablissement concernĂ© et fixe la durĂ©e de la prise en charge.

« Art. R. 50-79. – Dans l’exercice des compĂ©tences prĂ©vues au cinquiĂšme alinĂ©a du I de l’article 706-25-16, le juge de l’application des peines du tribunal judiciaire de Paris mandate le service pĂ©nitentiaire d’insertion et de probation territorialement compĂ©tent au regard du lieu de rĂ©sidence habituelle de la personne concernĂ©e ou, Ă  dĂ©faut, celui de Paris, pour veiller au respect des obligations. Ce service rend compte rĂ©guliĂšrement Ă  ce magistrat.
« Il est tenu par le juge de l’application des peines du tribunal judiciaire de Paris pour chaque personne soumise Ă  une mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion un dossier relatif au dĂ©roulement de la mesure. Ce dossier peut ĂȘtre consultĂ© par la personne concernĂ©e et son avocat au greffe du juge de l’application des peines.

« Art. R. 50-80. – La personne concernĂ©e par la mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion peut Ă  tout moment informer le juge de l’application des peines du tribunal judiciaire de Paris de l’Ă©volution de sa situation.
« Le juge de l’application des peines du tribunal judiciaire de Paris peut, chaque fois qu’il l’estime nĂ©cessaire, dĂ©cider d’office par une ordonnance motivĂ©e d’adapter les obligations auxquelles la personne est astreinte, afin de faciliter l’exĂ©cution de la mesure et de garantir la rĂ©alisation des buts poursuivis. Cette ordonnance n’est pas susceptible de recours.
« Les ordonnances prĂ©vues par le prĂ©sent article sont notifiĂ©es au procureur de la RĂ©publique antiterroriste et Ă  la personne concernĂ©e par lettre recommandĂ©e. Une copie de l’ordonnance est Ă©galement adressĂ©e par lettre recommandĂ©e ou par tĂ©lĂ©copie Ă  l’avocat de la personne concernĂ©e.

« Art. R. 50-81. – La demande de la personne concernĂ©e par la mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion tendant Ă  la mainlevĂ©e ou la modification de la mesure est adressĂ©e au tribunal de l’application des peines de Paris.
« ConformĂ©ment Ă  la premiĂšre phrase du dernier alinĂ©a de l’article 706-25-18, la personne concernĂ©e par la mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion peut demander au tribunal de l’application des peines de Paris la mainlevĂ©e de la mesure aprĂšs un dĂ©lai de trois mois Ă  compter de la dĂ©cision dĂ©finitive l’ayant ordonnĂ©e. Il est mis fin d’office Ă  la mesure si le tribunal n’a pas statuĂ© dans un dĂ©lai de trois mois Ă  compter de la rĂ©ception de la demande. En cas de rejet de la demande, aucune autre demande de mainlevĂ©e de la mesure ne peut ĂȘtre dĂ©posĂ©e avant l’expiration d’un dĂ©lai de trois mois.
« Lorsqu’il est saisi par la personne concernĂ©e d’une demande de modification de la mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste ou de rĂ©insertion, le tribunal de l’application des peines de Paris doit statuer dans un dĂ©lai de trois mois Ă  compter de la rĂ©ception de la demande. A dĂ©faut, la personne concernĂ©e peut directement saisir de sa demande, par lettre recommandĂ©e, la chambre de l’application des peines de la cour d’appel qui dispose du dĂ©lai d’un mois pour statuer.

« Art. R. 50-82. – Lorsque le tribunal de l’application des peines de Paris est saisi aux fins de modification ou de mainlevĂ©e de la mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion en application des dispositions de la premiĂšre phrase du dernier alinĂ©a de l’article 706-25-18, il statue dans les mĂȘmes conditions que celles prĂ©vues lorsqu’il ordonne une mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion.

« Art. R. 50-83. – Lorsqu’il estime que les conditions du renouvellement de la mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion mentionnĂ©es au III de l’article 706-25-16 sont rĂ©unies, le procureur de la RĂ©publique antiterroriste saisit la commission pluridisciplinaire des mesures de sĂ»retĂ© mentionnĂ©e Ă  l’article R. 50-71 et le tribunal de l’application des peines de Paris.
« L’article R. 50-74 est applicable. L’avis motivĂ© mentionnĂ© Ă  l’article R. 50-75 est rendu trois mois au moins avant la fin de la mesure. Cet avis est portĂ© Ă  la connaissance de la personne concernĂ©e par lettre recommandĂ©e.
« Le tribunal de l’application des peines de Paris se prononce avant l’expiration de la mesure dans les mĂȘmes conditions que celles prĂ©vues lorsqu’il ordonne une mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion.

« Art. R. 50-84. – En cas de suspension de plus de six mois des obligations de la mesure en raison de la dĂ©tention de la personne concernĂ©e conformĂ©ment Ă  l’article 706-25-20, le procureur de la RĂ©publique antiterroriste saisit le tribunal de l’application des peines de Paris avant la cessation de la dĂ©tention, aux fins de confirmation de la reprise d’une ou de plusieurs des obligations de la mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion.
« Le tribunal de l’application des peines de Paris statue dans les mĂȘmes conditions que celles prĂ©vues lorsqu’il ordonne une mesure judiciaire de prĂ©vention de la rĂ©cidive terroriste et de rĂ©insertion.

« Art. R. 50-85. – Les dĂ©cisions du tribunal de l’application des peines de Paris mentionnĂ©es au prĂ©sent chapitre peuvent ĂȘtre attaquĂ©es par la voie de l’appel, conformĂ©ment Ă  l’article 706-25-19, dans les conditions prĂ©vues au 2° de l’article 712-11. »

Article 2

Aux I, II et III de l’article R. 251 du code de procĂ©dure pĂ©nale, les mots compris entre : « dans sa rĂ©daction rĂ©sultant du dĂ©cret » et « , sous rĂ©serve des adaptations prĂ©vues au prĂ©sent titre » sont remplacĂ©s par les mots : « n° 2022-358 du 14 mars 2022 ».

Article 3

Le garde des sceaux, ministre de la justice, est chargĂ© de l’exĂ©cution du prĂ©sent dĂ©cret, qui sera publiĂ© au Journal officiel de la RĂ©publique française.

Date et signature(s)

Fait le 14 mars 2022.

Jean Castex
Par le Premier ministre :

Le garde des sceaux, ministre de la justice,
Éric Dupond-Moretti