🟩 DĂ©cret du 23 novembre 2021 tendant Ă  renforcer l’effectivitĂ© des droits des personnes victimes d’infractions commises au sein du couple ou de la famille

Références

NOR : JUSD2133858D
ELI : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2021/11/23/JUSD2133858D/jo/texte
Alias : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2021/11/23/2021-1516/jo/texte
JORF n°0273 du 24 novembre 2021, texte n° 6

Informations

Publics concernĂ©s : victimes, mineures ou majeures, de faits de violences ou d’infractions sexuelles commises au sein du couple ou de la famille ; personnes poursuivies ou condamnĂ©es pour ces infractions ; magistrats et greffiers ; associations spĂ©cialisĂ©es dans l’assistance des victimes de violences conjugales.

Objet : dĂ©cret visant Ă  renforcer les droits des victimes de violences et d’infractions commises au sein du couple ou de la famille.

Entrée en vigueur : le décret entre en vigueur le 1er février 2022 .

Notice : le dĂ©cret prĂ©cise les modalitĂ©s d’application de diverses dispositions du code pĂ©nal ou du code de procĂ©dure pĂ©nale afin de renforcer l’effectivitĂ© des droits et de la protection accordĂ©s par ces dispositions aux personnes, mineures ou majeures, victimes de violences ou d’infractions sexuelles commises au sein du couple ou de la famille.
Il prĂ©voit que les mesures de justice restaurative, applicables lorsque l’auteur d’une infraction a reconnu les faits reprochĂ©s, et qui sont possibles mĂȘme lorsque l’action publique est prescrite, peuvent notamment ĂȘtre mises en Ɠuvre en cas d’infraction sexuelle commise par un majeur sur un mineur.
Il prĂ©cise la conduite Ă  tenir par les autoritĂ©s judiciaires en cas de violences commises au sein du couple en prĂ©sence d’un mineur, afin que ce dernier soit Ă©galement considĂ©rĂ© comme victime et non comme tĂ©moin de ces faits, et puisse se constituer partie civile, le cas Ă©chĂ©ant en Ă©tant reprĂ©sentĂ© par un administrateur ad hoc.
Il prĂ©cise les dispositions du code de procĂ©dure pĂ©nale relatives aux modalitĂ©s selon lesquelles les personnes victimes de violences peuvent obtenir copie du certificat mĂ©dical rĂ©alisĂ© par un mĂ©decin requis par les autoritĂ©s judiciaires, afin de prĂ©ciser les rĂšgles applicables lorsqu’il s’agit d’une victime mineure, en indiquant que le mĂ©decin ne sera pas tenu de remettre une copie du certificat aux reprĂ©sentants lĂ©gaux de celui-ci s’il estime que cette remise pourrait ĂȘtre contraire Ă  l’intĂ©rĂȘt supĂ©rieur de l’enfant, notamment en cas de suspicion de violences intrafamiliales.
Il prĂ©voit la possibilitĂ© pour les associations d’aide aux victimes spĂ©cialisĂ©es dans la prise en charge et l’accompagnement des victimes de violences au sein du couple et dans les violences sexuelles et sexistes d’obtenir un agrĂ©ment du ministĂšre de la justice pour assister les victimes de ces infractions.
Il prĂ©cise qu’en cas de procĂ©dure pour non reprĂ©sentation d’enfant, doivent ĂȘtre vĂ©rifiĂ©es les allĂ©gations de la personne mise en cause justifiant les faits par l’existence de violences commises contre le mineur, aux fins notamment de permettre au tribunal d’apprĂ©cier, en cas de citation directe, l’application Ă©ventuelle des dispositions du code pĂ©nal sur l’Ă©tat de nĂ©cessitĂ©.

RĂ©fĂ©rences : les textes modifiĂ©s par le dĂ©cret peuvent ĂȘtre consultĂ©s, dans leur rĂ©daction issue de cette modification, sur le site LĂ©gifrance (https://www.legifrance.gouv.fr).

En-tĂȘte

Le Premier ministre,
Sur le rapport du garde des sceaux, ministre de la justice,
Vu le code de procédure pénale, notamment ses articles 10-1, 10-2, 10-5-1, 41, 41-3-1 et 706-50 ;
Vu le code pénal, notamment ses articles 132-80 et 225-7,
DĂ©crĂšte :

Article 1

Le code de procédure pénale (troisiÚme partie : décret) est modifié conformément aux dispositions du présent décret.

Article 2

L’article D. 1-1-1 est complĂ©tĂ© par deux alinĂ©as ainsi rĂ©digĂ©s :
« Lorsque les conditions prĂ©vues par l’article 10-1 sont rĂ©unies, et notamment que l’auteur de l’infraction a reconnu avoir commis les faits qui lui sont reprochĂ©s, les mesures de justice restaurative peuvent ĂȘtre mises en Ɠuvre y compris si la prescription de l’action publique est acquise.
« En cas de dĂ©cisions de classement sans suite, de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement dans des procĂ©dures concernant des infractions sexuelles commises par des majeurs sur des mineurs dont la commission est reconnue par leur auteur mais qui sont motivĂ©es par la prescription de l’action publique, le procureur de la RĂ©publique vĂ©rifie si une mesure de justice restaurative est susceptible d’ĂȘtre mise en Ɠuvre. »

Article 3

I. – L’intitulĂ© de la section III du chapitre II du titre prĂ©liminaire est complĂ©tĂ© par les mots : « ou de la famille ».

II. – AprĂšs l’article D. 1-11, il est insĂ©rĂ© un article D. 1-11-1 ainsi rĂ©digĂ© :
« Art. D. 1-11-1. – En cas de violences commises au sein du couple et relevant de l’article 132-80 du code pĂ©nal, le procureur de la RĂ©publique vĂ©rifie, avant de mettre l’action publique en mouvement, si ces violences ont Ă©tĂ© commises en prĂ©sence d’un mineur et si la circonstance aggravante prĂ©vue par le b des articles 222-8, 222-10 et 222-12 du mĂȘme code est caractĂ©risĂ©e, afin que les poursuites soient engagĂ©es sur le fondement de ces dispositions, sans prĂ©judice de la possibilitĂ©, pour la juridiction d’instruction ou de jugement uniquement saisie en application des 6° de ces articles de requalifier les faits en ce sens.
« Le procureur de la RĂ©publique veille alors Ă  ce que le mineur puisse se constituer partie civile lors des poursuites, le cas Ă©chĂ©ant en Ă©tant reprĂ©sentĂ© par un administrateur ad hoc en application des articles 706-50 et 706-51 du prĂ©sent code, y compris avant l’audience de jugement conformĂ©ment aux articles 419 et 420, afin qu’il puisse y ĂȘtre convoquĂ© comme partie civile et non comme tĂ©moin. Lorsqu’une information est ouverte, le juge d’instruction avise, conformĂ©ment Ă  l’article 80-3, le reprĂ©sentant lĂ©gal du mineur ou l’administrateur ad hoc dĂ©signĂ© par le procureur ou par lui-mĂȘme en application de l’article 706-50 de son droit de se constituer partie civile au nom du mineur. Les dispositions du prĂ©sent alinĂ©a sont Ă©galement applicables en cas de poursuites pour meurtre commis par le conjoint ou le concubin de la victime ou le partenaire liĂ© Ă  la victime par un pacte civil de solidaritĂ©, lorsque les faits ont Ă©tĂ© commis en prĂ©sence d’un mineur.
« Dans les cas prĂ©vus par les deux alinĂ©as prĂ©cĂ©dents, le procureur de la RĂ©publique veille Ă©galement Ă  ce que figurent au dossier de la procĂ©dure dont est saisie la juridiction de jugement tous les Ă©lĂ©ments permettant Ă  celle-ci d’apprĂ©cier l’importance du prĂ©judice subi par le mineur et de se prononcer, en application des dispositions du code pĂ©nal et du code civil, sur le retrait total ou partiel de l’autoritĂ© parentale ou de son exercice ou ainsi que sur la suspension des droits de visite et d’hĂ©bergement, le cas Ă©chĂ©ant en versant au dossier des piĂšces Ă©manant de procĂ©dures suivies devant le tribunal judiciaire, le juge aux affaires familiales ou le juge des enfants, ou en requĂ©rant s’il y a lieu un examen ou une expertise psychologique du mineur. »

Article 4

L’article D. 1-12 est ainsi modifiĂ© :
1° Au premier alinĂ©a, les mots : « le prĂ©sent article » sont remplacĂ©s par les mots : « les II Ă  VI du prĂ©sent article, sous rĂ©serve des dispositions du VII lorsqu’il s’agit d’une victime mineure » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« VII. – Lorsque l’examen mĂ©dical concerne une victime mineure, le mĂ©decin n’est pas tenu de remettre une copie du certificat aux reprĂ©sentants lĂ©gaux du mineur qui en font la demande s’il estime que cette remise pourrait ĂȘtre contraire Ă  l’intĂ©rĂȘt supĂ©rieur de l’enfant, notamment en cas de suspicion de violences intrafamiliales, ou si le mineur disposant d’un degrĂ© de maturitĂ© suffisant, le refuse ; dans ce cas, la remise de la copie du certificat mĂ©dical peut ĂȘtre demandĂ©e conformĂ©ment aux V et VI. »

Article 5

I. – L’article D. 1-12-1 est complĂ©tĂ© par deux alinĂ©as ainsi rĂ©digĂ©s :
« Cet agrĂ©ment est de compĂ©tence gĂ©nĂ©rale lorsqu’il concerne toutes les infractions et de compĂ©tence spĂ©cialisĂ©e lorsqu’il ne s’applique qu’aux violences au sein du couple et aux violences sexuelles et sexistes.
« L’agrĂ©ment de compĂ©tence gĂ©nĂ©rale comprenant les prĂ©rogatives de l’agrĂ©ment de compĂ©tence spĂ©cialisĂ©e, une association ne peut obtenir qu’un seul agrĂ©ment pendant une mĂȘme pĂ©riode. »

II. – Au premier alinĂ©a de l’article D. 1-12-2, les mots : « L’association agrĂ©Ă©e propose Ă  toute personne victime d’infraction pĂ©nale qui en fait la demande, » sont remplacĂ©s par les mots : « L’association agrĂ©Ă©e propose, si elle dispose d’un agrĂ©ment de compĂ©tence gĂ©nĂ©rale, Ă  toute personne victime d’infraction pĂ©nale et, si elle dispose d’un agrĂ©ment de compĂ©tence spĂ©cialisĂ©e, Ă  toute personne victime d’infraction liĂ©e aux violences au sein du couple et aux violences sexuelles et sexistes, lorsque cette personne en fait la demande, ».

III. – Au cinquiĂšme alinĂ©a de l’article D. 1-12-13, la rĂ©fĂ©rence Ă  l’article D. 1-12-8 est remplacĂ©e par une rĂ©fĂ©rence Ă  l’article D. 1-12-9.

IV. – Au premier alinĂ©a de l’article D. 47-6-15, les mots : « avec lesquelles les chefs de la cour d’appel ont passĂ© la convention prĂ©vue par le dernier alinĂ©a de l’article 41 » sont remplacĂ©s par les mots : « ayant fait l’objet d’un agrĂ©ment de compĂ©tence gĂ©nĂ©rale en application de l’article D. 1-12-1 ».

Article 6

AprĂšs l’article D. 47-11-2, il est insĂ©rĂ© un article D. 47-11-3 ainsi rĂ©digĂ© :
« Art. D. 47-11-3. – Lorsqu’une personne mise en cause pour le dĂ©lit de non reprĂ©sentation d’enfant prĂ©vu par l’article 227-5 du code pĂ©nal soutient que les faits qui lui sont reprochĂ©s ont Ă©tĂ© justifiĂ©s par des violences ou toutes autres infractions relevant de l’article 706-47 commises sur le mineur par la personne qui a le droit de le rĂ©clamer, le procureur de la RĂ©publique veille Ă  ce qu’il soit procĂ©dĂ© Ă  la vĂ©rification de ces allĂ©gations avant de dĂ©cider de mettre ou non l’action publique en mouvement. En cas de citation directe exercĂ©e par la victime, il veille Ă  ce que le tribunal correctionnel puisse disposer des Ă©lĂ©ments lui permettant d’apprĂ©cier la rĂ©alitĂ© de ces violences et l’application Ă©ventuelle de l’article 122-7 du code pĂ©nal relatif Ă  l’Ă©tat de nĂ©cessitĂ©. »

Article 7

L’article D. 45-2 devient l’article D. 45-1-1, et l’article D. 45-2-1 figurant dans le titre IV du livre Ier, dans sa rĂ©daction rĂ©sultant de l’article 7 du dĂ©cret n° 2021-1130 du 30 aoĂ»t 2021 pris pour l’application des dispositions de la loi n° 2020-1672 du 24 dĂ©cembre 2020 relative au Parquet europĂ©en, Ă  la justice environnementale et Ă  la justice pĂ©nale spĂ©cialisĂ©e et portant diverses modifications du code de procĂ©dure pĂ©nale, devient l’article D. 45-2.

Article 8

Le prĂ©sent dĂ©cret est applicable sur l’ensemble du territoire de la RĂ©publique.

Article 9

Le présent décret entre en vigueur le 1er février 2022.

Article 10

Le garde des sceaux, ministre de la justice, est chargĂ© de l’exĂ©cution du prĂ©sent dĂ©cret, qui sera publiĂ© au Journal officiel de la RĂ©publique française.

Date et signature(s)

Fait le 23 novembre 2021.

Jean Castex
Par le Premier ministre :

Le garde des sceaux, ministre de la justice,
Éric Dupond-Moretti