Au sommaire :
Faits :
le 1er juin 2013, la sociĂ©tĂ© de La Cadène a consenti Ă M. X…, qui occupait dĂ©jĂ les lieux et qui avait renoncĂ© Ă se prĂ©valoir du droit au statut des baux commerciaux lui Ă©tant acquis Ă l’expiration du prĂ©cĂ©dent bail dĂ©rogatoire, un bail pour une durĂ©e de vingt-quatre mois. Le 1er juin 2015, les parties ont conclu un nouveau bail dĂ©rogatoire courant jusqu’au 31 mai 2016.
Le 31 mars 2016, la sociĂ©tĂ© de La Cadène a informĂ© M. X… de sa volontĂ© de ne pas consentir un nouveau bail.
M. X… ayant revendiquĂ© le droit au statut des baux commerciaux, la sociĂ©tĂ© de La Cadène l’a assignĂ© en expulsion.
Moyen invoqué par le requérant :
M. X… fait grief Ă l’arrĂŞt de le dĂ©clarer sans droit ni titre depuis le 1er juin 2016, alors « que le preneur acquiert son droit Ă la propriĂ©tĂ© commerciale Ă l’issue du bail dĂ©rogatoire, lorsqu’il justifie d’une entrĂ©e dans les lieux depuis au moins trois ans en application de l’article L. 145-5 du code de commerce en sa rĂ©daction issue de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 ; que, pour dire que M. X… n’avait pas acquis la propriĂ©tĂ© commerciale, la cour d’appel a retenu que les parties avaient conclu un bail dĂ©rogatoire le 1er juin 2013, d’une durĂ©e de 24 mois, puis un nouveau bail dĂ©rogatoire le 1er juin 2015, d’une durĂ©e de 12 mois, ce dont elle a dĂ©duit que la durĂ©e globale des baux successifs n’excĂ©dait pas la durĂ©e maximale de trois ans ; qu’en statuant ainsi, quand elle constatait que M. X… justifiait d’une entrĂ©e dans les lieux antĂ©rieure au 1er juin 2013, ce dont il rĂ©sultait que le preneur avait acquis la propriĂ©tĂ© commerciale Ă la date du 1er juin 2016 et qu’il n’était pas, en consĂ©quence, occupant sans droit, ni titre, Ă cette date, la cour d’appel a violĂ© l’article susvisĂ©. »
Textes appliquĂ©s :Â
Vu l’article L. 145-5 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 18 juin 2014 :
La loi du 18 juin 2014 a ajouté à l’article L. 145-5 du code de commerce une disposition selon laquelle les parties ne peuvent plus conclure un nouveau bail dérogatoire pour exploiter le même fonds dans les mêmes locaux à l’expiration d’une durée de trois ans que ne peuvent excéder les baux dérogatoires successifs.
Selon ce texte, les parties ne peuvent pas conclure un nouveau bail dérogatoire pour exploiter le même fonds dans les mêmes locaux à l’expiration d’une durée totale de trois ans que ne peuvent excéder les baux dérogatoires successifs et qui court dès la prise d’effet du premier bail dérogatoire, même si le preneur a renoncé, à l’issue de chaque bail dérogatoire, à l’application du statut des baux commerciaux.
En application de l’article 21 II de la loi du 18 juin 2014, les baux dérogatoires conclus à compter du 1er septembre 2014 sont soumis au nouvel article L. 145-5 du code de commerce.
Raisonnement de la cour d’appel :
Pour dĂ©clarer M. X… occupant sans droit ni titre, après avoir constatĂ© que, le 1er juin 2013, les parties avaient conclu un nouveau bail dĂ©rogatoire stipulant que M. X…, qui Ă©tait dans les lieux en exĂ©cution d’un prĂ©cĂ©dent bail dĂ©rogatoire, renonçait expressĂ©ment Ă se prĂ©valoir du statut des baux commerciaux et que la rĂ©gularitĂ© de cet acte n’était pas contestĂ©e, l’arrĂŞt retient qu’à cette date, les parties pouvaient conclure un bail dĂ©rogatoire de deux ans sans que l’antĂ©rioritĂ© du bail prĂ©cĂ©dent n’ait Ă ĂŞtre prise en compte, que la loi du 18 juin 2014, n’ayant pas d’effet rĂ©troactif, n’a pas remis en cause la situation antĂ©rieure de sorte que ne pouvait ĂŞtre prise en compte l’occupation rĂ©elle des lieux avant le 1er juin 2013 et le bail conclu le 1er juin 2015, d’une durĂ©e d’un an, avait pour effet de porter la durĂ©e cumulĂ©e des baux pouvant ĂŞtre retenue Ă trente-six mois, soit la durĂ©e maximale dĂ©sormais autorisĂ©e.
Solution de la Cour de cassation :
En statuant ainsi, alors que, pour pouvoir déroger aux dispositions du statut des baux commerciaux, le bail conclu le 1er juin 2015, postérieurement à l’entrée en vigueur du nouvel article L. 145-5 du code de commerce issu de la loi du 18 juin 2014, devait répondre aux exigences de ce texte et, par suite, ne pas avoir une durée cumulée avec celle des baux dérogatoires conclus précédemment pour exploiter le même fonds dans les mêmes locaux de plus de trois ans courant à compter de la date d’effet du premier bail dérogatoire, la cour d’appel a violé le texte susvisé.
Cass., 3e civ., 22 octobre 2020, n°19-20.443