🟧 Avis n°HCFP-2023-7 du 22 septembre 2023 relatif à la révision du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027

Références

NOR : HCFX2325649V
Source : JORF n°0225 du 28 septembre 2023, texte n° 119

Article

 

Synthèse
Le Gouvernement a modifié les hypothèses macroéconomiques du projet de loi de programmation des finances publiques, sur lequel le Haut Conseil avait rendu un avis en septembre 2022. Il en a saisi le Haut Conseil conformément à la loi organique, ainsi que de la trajectoire de finances publiques associée.
L’estimation de l’écart de production et celle de la croissance potentielle constituent le fondement du scénario macroéconomique 2023-2027. Dans les deux cas, elles apparaissent optimistes. Malgré une légère révision en hausse par rapport au précédent projet, le Haut Conseil considère que l’évaluation de l’écart de production du Gouvernement pour 2023 (- 1,2 % au lieu de – 1,4 %) reste optimiste. A 1,35 % en moyenne annuelle sur la période, celle, inchangée, de croissance potentielle est supérieure aux autres prévisions disponibles et suppose notamment un impact des réformes du marché du travail que le Haut Conseil juge trop important et rapide.
Le scénario de croissance associé est lui aussi optimiste.
En 2024, la prévision de croissance (+ 1,4 %), bien que révisée en baisse de 0,2 point par rapport au projet présenté en septembre 2022, est supérieure à celle du consensus des économistes (+ 0,8 %), notamment parce qu’elle suppose que le durcissement des conditions de crédit a déjà produit l’essentiel de ses effets.
Au-delà, sur le reste de la période de programmation, le scénario macroéconomique permettant de rejoindre en 2027 le niveau attendu de PIB potentiel repose sur des hypothèses favorables, avec un recul continu du taux d’épargne des ménages venant soutenir la consommation, le maintien à un niveau élevé du taux d’investissement des entreprises et une contribution positive du commerce extérieur.
Assise sur des hypothèses macroéconomiques que le Haut conseil estime ainsi optimistes, la trajectoire de solde public prévoit une décrue progressive du déficit, qui serait ramené à 2,7 points de PIB en 2027, un niveau légèrement amélioré par rapport à celui présenté en septembre 2022 alors que le poids de la charge d’intérêts est considérablement alourdi et que le taux de prélèvements obligatoires reste quasi identique à celui présenté alors. Ainsi, cette trajectoire suppose, en plus de l’effet des réformes des retraites et de l’assurance chômage, la réalisation d’importantes économies structurelles en dépenses dont le Gouvernement indique qu’elles ne pourront être précisées qu’à l’issue de l’exercice de revues de dépenses en cours.
Le Gouvernement a révisé ses objectifs de finances publiques à l’horizon de 2027 par rapport au projet présenté en septembre 2022 en faveur du désendettement sur lequel le Haut Conseil a maintes fois mis l’accent. Pour autant, la trajectoire présentée par le Gouvernement demeure peu ambitieuse au regard des engagements européens de la France. Le projet de loi de programmation ne prévoit pas de retour rapide vers l’objectif d’équilibre des finances publiques. Alors même que les hypothèses de croissance demeurent optimistes, l’inflexion modeste de la trajectoire de dette expose au risque d’une divergence accrue avec le reste de la zone euro.
Le Haut Conseil rappelle que le retour à des niveaux de dette garantissant à la France de disposer de marges de manœuvre suffisantes est nécessaire pour qu’elle soit en mesure de faire face à l’avenir à des chocs macroéconomiques ou financiers et aux besoins d’investissement public élevés que nécessite en particulier la transition écologique. Pour assurer la soutenabilité de ses finances publiques, la stratégie de prélèvements obligatoires affichée rend d’autant plus impérative la maîtrise de la dépense publique, les revues de dépenses en cours devant conduire à des économies effectives.

 

Observations liminaires
1. Sur le périmètre du présent avis

1. Le Haut Conseil des finances publiques a été saisi par le Gouvernement le 15 septembre 2023 au titre du VI de l’article 61 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 modifiée relative aux lois de finances, afin de se prononcer sur les modifications que le Gouvernement prévoit d’apporter aux prévisions associées au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 (1).
2. Le VI de l’article 61 de la loi organique précité prévoit que : « Lorsque, au cours de l’examen par le Parlement d’un projet de loi de programmation des finances publiques, d’un projet de loi de finances ou d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement entend réviser les prévisions macroéconomiques sur lesquelles reposait initialement son projet, il informe sans délai le Haut Conseil des finances publiques du nouvel état de ses prévisions. Avant l’adoption définitive de la loi de programmation des finances publiques, de la loi de finances ou de la loi de financement de la sécurité sociale, le Haut Conseil rend un avis public sur ces prévisions ». Le présent avis examine donc la nouvelle trajectoire du projet de loi de programmation pour les années 2023-2027, modifiée par rapport au projet de loi initial.

2. Sur les informations transmises et les délais

3. Le Haut Conseil des finances publiques a été saisi par le Gouvernement, le 15 septembre 2023, des modifications apportées aux prévisions macroéconomiques sous-jacentes au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, en vue de rendre un avis le 22 septembre 2023.
4. Cette saisine a été accompagnée de réponses détaillées à un questionnaire adressé au préalable aux administrations compétentes.

3. Sur la méthode utilisée par le Haut Conseil

5. Afin d’apprécier le réalisme des prévisions macroéconomiques modifiées associées au projet de loi de programmation des finances publiques, le Haut Conseil s’est fondé sur les dernières statistiques disponibles ainsi que sur les informations communiquées par le Gouvernement.
6. Le Haut Conseil s’est également appuyé sur les dernières prévisions produites par un ensemble d’organismes comprenant des institutions internationales et nationales : la Commission européenne, le Fonds monétaire international (FMI), l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), la Banque centrale européenne (BCE), l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), la Banque de France et des instituts de conjoncture tels que Rexecode et l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).
7. Le Haut Conseil a procédé à l’audition des représentants de la direction générale du Trésor, de la direction du budget et de la direction de la sécurité sociale. Le Haut Conseil a aussi auditionné des organismes extérieurs à l’administration des finances (INSEE, Banque de France, Rexecode et OFCE) sur les perspectives de l’économie française.

 

Le rôle des LPFP dans la gouvernance des finances publiques
Introduites dans l’ordre juridique national par la révision constitutionnelle de 2008, les lois de programmation des finances publiques (LPFP) ont pour fonction de définir les orientations pluriannuelles des finances publiques, dans un objectif d’équilibre des comptes publics.
Leur rôle dans la gouvernance des finances publiques françaises a été progressivement renforcé et formalisé. Ainsi la loi organique du 17 décembre 2012, qui transpose en droit national le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), prévoit qu’une LPFP fixe l’objectif à moyen terme des administrations publiques prévu par ce traité et détermine une trajectoire pluriannuelle de solde public en vue de la réalisation de cet objectif. Elle crée également le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) auquel elle confie le soin d’apprécier la cohérence des projets de lois de finances et de financement de la Sécurité sociale avec les orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans les LPFP. Le HCFP doit de plus identifier s’il apparaît des « écarts importants » entre l’exécution de l’année écoulée et ces orientations pluriannuelles. Dans ce cas, le Gouvernement doit présenter des mesures de correction permettant de revenir sur la trajectoire de retour à l’équilibre structurel des comptes publics. Les LPFP couvrent une période de trois ans au minimum. Elles peuvent comporter des règles relatives à la gestion des finances publiques ainsi qu’à l’information du Parlement et au contrôle qu’il exerce. Ces règles peuvent avoir pour objet d’encadrer les dépenses, les recettes et le solde ou le recours à l’endettement public.
Les lois de programmation des finances publiques ont vu leur cadre précisé et complété par la loi organique du 28 décembre 2021 qui, par ailleurs, intègre les dispositions organiques régissant les LPFP dans la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).
Si la création des LPFP a marqué un progrès incontestable de la gouvernance des finances publiques en inscrivant la gestion de celles-ci dans un cadre pluriannuel, et si leur rôle n’a cessé de se renforcer en droit, elles ne suffisent pas, à elles seules, à assurer la maîtrise des finances publiques. Depuis leur introduction dans le cadre de gouvernance des finances publiques, cinq lois de programmation ont été adoptées (2009-2012, 2011-2014, 2012-2017, 2014-2019 et 2018-2022). Non contraignants, reposant sur des hypothèses généralement optimistes et rapidement obsolètes, leurs objectifs n’ont que rarement été atteints. Depuis 2008, la situation des finances publiques françaises s’est ainsi nettement détériorée, contrairement aux objectifs affichés avec constance par les lois de programmation.

 

8. Le Haut Conseil expose tout d’abord ses observations sur l’estimation du PIB potentiel (I), puis sur les prévisions macroéconomiques sur lesquelles repose le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 (II) avant de se prononcer sur la cohérence de la programmation des finances publiques au regard de l’objectif de moyen terme retenu par le projet et des engagements européens de la France (III).

1. Observations relatives à l’estimation du PIB potentiel

9. Le Haut Conseil doit se prononcer sur l’estimation révisée du PIB potentiel retenue par le Gouvernement dans ce nouveau projet de loi de programmation. Cette estimation joue un rôle fondamental dans la construction du scénario macroéconomique.
10. En effet, le PIB potentiel est défini comme la production qui serait obtenue une fois éliminés les chocs temporaires qui affectent l’économie, en mobilisant à leur niveau d’équilibre (c’est-à-dire sans entraîner de tensions inflationnistes ou déflationnistes) les facteurs de production disponibles : dans l’ignorance des chocs qui vont affecter l’économie à l’avenir, c’est donc le niveau vers lequel on peut prévoir que le PIB effectif va converger à l’horizon de la loi de programmation. La croissance effective sur la période considérée dépend donc de la croissance potentielle, qui résulte elle-même, d’une part, de la croissance attendue des facteurs de production (capital et emploi) et de celle de leur productivité, et, d’autre part, de la résorption de l’écart initial entre le PIB observé et le PIB potentiel, appelé écart de production : quand cet écart est négatif, la croissance prévue doit être plus forte que la croissance potentielle, et, inversement, quand il est positif, moins forte que celle-ci.

1. Le scénario du Gouvernement

11. Selon la saisine du Gouvernement, « Le scénario potentiel est peu modifié par rapport à la version initiale de la LPFP. La perte pérenne de PIB potentiel en 2020-22 est revue légèrement à la hausse ce qui reflète à la fois les pertes de productivité plus élevées sur le passé dans les nouveaux comptes annuels et un rebond de cette même productivité plus tardif qu’anticipé. […] La perte pérenne liée à la succession des crises sanitaire et énergétique, précédemment estimée à un peu moins d’un point, serait révisée à la hausse à un peu plus d’un point (révision de − ½ pt, de − 1 ¼ pt de PIB au lieu de − ¾ pt en septembre 2022). A partir de 2023, la croissance potentielle s’établirait à 1,35 %, la capacité productive de l’économie étant soutenue par les réformes du Gouvernement. Ces dernières contribueraient notamment à accroître l’offre de travail et parvenir au plein emploi à l’horizon 2027. »
12. « La croissance effective sur la période 2025-2027 serait supérieure à son rythme potentiel de 1,35 % et l’écart de production ainsi refermé en 2027. »

2. Appréciation du Haut Conseil

13. Le Gouvernement a réajusté sa trajectoire de croissance potentielle pour prendre en compte un impact plus fort des crises sanitaire et énergétique que dans la version initiale du projet de loi de programmation des finances publiques présenté en septembre 2022. Il estime désormais que la perte de PIB potentiel en niveau s’élève à 1 ¼ point de PIB au lieu de ¾ point dans le PLPFP 2023-2027 et dans le programme de stabilité 2023-2027, mais sans changer pour autant sa prévision de croissance potentielle de 1,35 % par an sur la période 2023-2027.
14. Le Gouvernement évalue en conséquence à -0,9 % l’écart de production en 2022 au lieu de – 1,1 % dans le PLPFP 2023-2027 (2). L’écart de production se creuserait en 2023 à – 1,2 %, puis se refermerait progressivement jusqu’à devenir nul en 2027.
15. L’évaluation de l’écart de production du Gouvernement correspond à celle de la Banque de France (- 0,9 %) et se situe entre celle de l’OCDE, qui prévoit un écart de production beaucoup plus creusé (- 1,5 %), et celle du FMI (- 0,7 %). En revanche, pour la Commission Européenne et Rexecode, l’écart de production serait positif en 2022.
16. Le Gouvernement maintient sa prévision de croissance potentielle, fixée à 1,35 % à partir de 2023. Cette évaluation est la plus élevée des prévisions disponibles. Pour la période 2023-2024, elle est proche de celle de l’OFCE (1,3 %), mais plus élevée que celle attendue par l’OCDE (1,1 %). Elle est également plus élevée que la prévision de la Banque de France (1,2 %) pour la période 2023-2025. Sur l’horizon de la programmation, 2023-2027, la prévision de croissance potentielle du Gouvernement est proche de celle du FMI (1,3 %), plus élevée que celles de la Commission européenne (0,8 %) et de Rexecode (1,2 %).
17. La trajectoire de PIB potentiel du Gouvernement reste supérieure en fin de période à celle de la Commission européenne (+ 2,3 %) et à celle du FMI (+ 0,3 %).

Graphique 1. – Comparaison des prévisions de PIB potentiel en volume en France

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Source : prévisions économiques de printemps de la Commission européenne (mai 2023), de l’OCDE (juin 2023), du FMI (avril 2023), du programme de stabilité du Gouvernement 2023-2027 et du projet de loi de programmation de finances publiques de septembre 2023
18. La ventilation de la croissance potentielle entre ses différentes composantes – productivité globale des facteurs (PGF), travail et capital – est la même que celle présentée dans la version initiale du PLPFP, sur laquelle le Haut Conseil s’est prononcé dans l’avis n° 2022-05.
19. Plus précisément, le Gouvernement maintient son estimation d’une contribution de la PGF (entre 0,4 et 0,5 point) conforme aux tendances antérieures à la crise sanitaire, légèrement inférieure à celle de la LPFP 2018-2022. Il maintient également son estimation de la contribution du capital (entre 0,5 et 0,6 point), en hausse par rapport à sa tendance d’avant-crise, qui repose sur l’hypothèse que les mesures de soutien aux entreprises (baisse de l’impôt sur les sociétés (IS), plan de relance, France 2030, suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises) se traduisent par une augmentation de l’investissement, malgré le durcissement des conditions de financement.
20. Concernant le facteur travail, le Gouvernement estime une contribution entre 0,3 et 0,4 point entre 2023 et 2027, en hausse par rapport à la LPFP 2018-2022. Les prévisions de l’emploi potentiel intègrent l’effet global attendu des réformes (i.e. la réforme des retraites, la nouvelle réforme de l’assurance chômage, l’élargissement de l’apprentissage au lycée professionnel, la transformation de Pôle Emploi en France Travail, la réforme du RSA) tel qu’il est évalué par le Gouvernement.
21. Le Gouvernement n’a pas intégré les dernières prévisions de population active de l’INSEE dans son évaluation de l’impact de la réforme des retraites. Ces prévisions conduiraient à relever légèrement la croissance de la population active mais reposent sur des hypothèses un peu favorables en matière d’ajustement des comportements d’activité des seniors. S’agissant de l’impact de la nouvelle réforme de l’assurance chômage, le Gouvernement a fourni des précisions sur sa prévision de 100 000 à 150 000 emplois créés à moyen terme. Cette évaluation repose sur une estimation de la diminution du chômage marquée au regard des évaluations disponibles de réformes de ce type. Elle s’appuie en outre sur l’hypothèse optimiste que la diminution du chômage se traduirait intégralement par une hausse équivalente de l’emploi sans hausse de l’inactivité. Comme il l’avait énoncé dans son avis n° 2023-6 sur le programme de stabilité, le Haut Conseil considère donc au total que l’impact de la réforme de l’assurance chômage sur la croissance potentielle est surestimé.
22. Le Haut Conseil note que le Gouvernement a révisé à la baisse d’un demi-point ses estimations de PIB potentiel sur l’ensemble de la période, mais considère toujours que l’hypothèse d’écart de production en 2022 (- 0,9 %) comme celle de croissance potentielle (1,35 % par an de 2023 à 2027) sont optimistes, notamment parce que cette dernière suppose des effets importants et rapides de ses réformes.
23. L’estimation de l’écart de production et celle de la croissance potentielle constituent le fondement du scénario macroéconomique 2023-2027. Dans les deux cas, elle apparaît optimiste. Malgré une légère révision en hausse par rapport au précédent projet, le Haut Conseil considère que l’évaluation de l’écart de production du Gouvernement pour 2023 (- 1,2 % au lieu de – 1,4 %) reste optimiste. A 1,35 % en moyenne annuelle sur la période, celle, inchangée, de croissance potentielle est supérieure aux autres prévisions disponibles et suppose notamment un impact des réformes du marché du travail que le Haut Conseil juge trop important et rapide.

2. Observations sur le scénario macroéconomique pour les années 2023 à 2027
1. Le scénario du Gouvernement

24. Selon la saisine du Gouvernement, « l’activité progresserait de + 1,0 % […] en 2023, inchangée par rapport au PSTAB. […] En 2024, l’activité accélèrerait à + 1,4 % avec, dans la continuité du deuxième semestre 2023, des dynamiques contrastées selon les postes de la demande. Le principal soutien à l’activité serait l’accélération progressive de la consommation des ménages en parallèle de la normalisation de l’inflation. »
25. « La croissance effective sur la période 2025-2027 serait supérieure à son rythme potentiel de 1,35 % […]. La croissance s’établit à 1,7 % en moyenne sur la période 2024-2027, avec un rythme un peu plus important en 2027 (1,8 %), reflétant la dissipation progressive des contraintes liés à la crise sanitaire et au conflit en Ukraine. »
26. « L’inflation (au sens de l’IPC) ralentirait légèrement en 2023, à + 4,9 % en moyenne annuelle (après + 5,2 % en 2022). [Elle] diminuerait sensiblement en 2024, à + 2,6 %. »
27. « L’inflation refluerait progressivement vers son niveau de long terme estimé à 1,75 % au fur et à mesure de la fin de la transmission des hausses passées de prix de matières premières et du ralentissement des salaires (dans le sillage de celui, déjà entamé, de l’inflation). Elle reviendrait en 2026 à + 1,75 % au sens de l’IPC, un niveau cohérent avec la cible de la BCE de 2 % pour la zone euro au sens de l’IPCH. »

2. Appréciation du Haut Conseil

a. Observations relatives aux années 2023 et 2024 (3)
28. Pour 2023, le Haut Conseil estime que la prévision de croissance est plausible.
29. Il estime que celle pour 2024 (+ 1,4 %), supérieure à celle du consensus des économistes (+ 0,8 %), est élevée, notamment parce qu’elle suppose que le durcissement des conditions de crédit a déjà produit l’essentiel de ses effets et que l’ensemble des composantes de la demande tirera la croissance en 2024.
30. Celle d’inflation (+ 2,6 %) et de masse salariale des branches marchandes non agricoles (+ 3,9 % hors prime de partage de la valeur) est plausible. Concernant cette dernière, d’une part, l’hypothèse optimiste d’une croissance élevée de l’activité affecte favorablement la prévision d’emploi et donc de masse salariale ; d’autre part, le Gouvernement suppose un rebond un peu fort de la productivité du travail et un ralentissement marqué du salaire par tête qui jouent négativement sur la prévision de masse salariale. Ces deux effets se compensent globalement.
b. Observations relatives aux années 2025 à 2027
31. Le scénario macroéconomique retenu par le Gouvernement pour les années 2025 à 2027 présenté dans le projet de LPFP est très proche de celui inscrit dans le programme de stabilité 2023-2027, sur lequel le Haut Conseil s’est prononcé dans l’avis n° 2023-6.
32. Les hypothèses de croissance du PIB de 2025 à 2027 sont inchangées par rapport à celles du programme de stabilité. Le Gouvernement prévoit ainsi une croissance supérieure à la croissance potentielle sur l’ensemble de la période 2025-2027 : la croissance du PIB est attendue à 1,7 % en 2025 et 2026, puis 1,8 % en 2027, contre une croissance potentielle estimée à 1,35 % par an sur la même période. Dans ce contexte, l’écart de production, estimé à – 1,2 % du PIB potentiel en 2023, se réduirait graduellement pour se refermer en 2027.
33. Cette fermeture de l’écart de production sur la période repose en premier lieu sur le dynamisme de la consommation des ménages (+ 2,2 % par an sur la période 2025-2027) en raison d’une part de la progression du pouvoir d’achat liée notamment au repli de l’inflation et à une dynamique de la masse salariale (+ 3,4 % par an sur la période) soutenue par de fortes créations d’emplois (+ 1,3 % par an en moyenne), d’autre part d’un retour progressif du taux d’épargne des ménages à son niveau d’avant-crise.
34. Le taux d’épargne des ménages est en effet prévu en baisse sur toute la période, prolongeant en l’amplifiant la baisse de 0,4 point prévue pour 2024. Il reculerait ainsi d’un point par an en moyenne, refluant de 18,2 % en 2024 à 15,3 % en 2027, soit un niveau très proche du taux d’épargne d’avant-crise. Ce scénario suppose que les facteurs qui ont conduit à accroître le taux d’épargne des ménages depuis la crise sanitaire au-dessus de son niveau des années 2010 sont de nature temporaire, ce que rien ne permet aujourd’hui d’affirmer avec certitude.

Graphique 2. – Taux d’épargne des ménages en France

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Sources : INSEE, projet de loi de programmation des finances publiques 2023-2027 révisé
35. Le dynamisme de l’activité repose également sur le maintien à un niveau élevé du taux d’investissement des entreprises et sur une contribution positive du commerce extérieur sur l’ensemble de la période. Si on ne peut exclure aucune de ces hypothèses, chacune d’entre elles est affectée d’aléas baissiers. Le scénario du Gouvernement repose donc sur une combinaison d’hypothèses favorables.
36. Le maintien du taux d’investissement des entreprises à son plus haut historique (supérieur à 25 % sur toute la période) semble aussi optimiste, alors que la BCE s’est engagée dans un cycle de resserrement de la politique monétaire en zone euro, rendant les conditions de financement moins favorables. La transition écologique pourrait toutefois venir soutenir l’investissement dans les années à venir.
37. Enfin, le Gouvernement anticipe une contribution positive de 0,1 point par an du commerce extérieur à la croissance. Cette prévision suppose une dynamique soutenue du commerce mondial sur l’ensemble de la période (+3,2 % de la demande mondiale adressée à la France), en dépit d’une incertitude élevée liée à l’accumulation des risques géopolitiques, financiers et sanitaires et de la nécessité pour les banques centrales de freiner la demande afin de maîtriser l’inflation. Elle repose de surcroît sur un rattrapage partiel des pertes de parts de marché à l’exportation enregistrées depuis la crise sanitaire. Ce rattrapage est possible, notamment du fait des secteurs comme l’aéronautique qui ont pâti des difficultés d’approvisionnement qui ont suivi la crise sanitaire, mais constituerait une rupture avec la tendance observée depuis le début des années 2000, qui plus est dans le contexte actuel où l’appréciation du taux de change effectif réel de la zone euro pèse sur la compétitivité-prix européenne.
38. Au total, la prévision de croissance du PIB retenue par le Gouvernement de 2025 à 2027 est affectée d’aléas essentiellement baissiers, y compris en l’absence de chocs imprévisibles comme l’ont été la crise sanitaire ou la guerre en Ukraine. En outre, l’effort massif de maîtrise de la dépense publique primaire que suppose la trajectoire présentée par le Gouvernement, qui marquerait une nette rupture par rapport aux tendances des décennies précédentes, devrait peser sur l’activité sur l’ensemble de la période.
39. Le Gouvernement inscrit un reflux de l’inflation à 2,0 % en moyenne annuelle en 2025, puis à 1,75 % en 2026 et en 2027. Ces prévisions n’ont pas été révisées depuis le programme de stabilité présenté en avril et l’ont été marginalement par rapport au précédent PLPFP (2,1 % attendu en 2025).
40. La séquence désinflationniste devrait effectivement se poursuivre, sous l’effet de l’ajustement retardé des hausses de salaires au repli de l’inflation. Toutefois, alors que le poids des services dans l’IPC est élevé (50,1 % en 2023), la hausse de leurs prix (3,0 % sur un an depuis février) dépasse de plus d’un point le rythme d’avant la crise sanitaire (1,8 % en moyenne par an de 1995 à 2019) et pourrait se révéler plus persistante qu’attendu dans le scénario du Gouvernement, dans un contexte où la croissance effective dépasserait celle du PIB potentiel.
41. En 2024, la prévision de croissance (+ 1,4 %), bien que révisée en baisse de 0,2 point par rapport au projet présenté en septembre 2022, est supérieure à celle du consensus des économistes (+ 0,8 %), notamment parce qu’elle suppose que le durcissement des conditions de crédit a déjà produit l’essentiel de ses effets.
42. Au-delà, sur le reste de la période de programmation, le scénario macroéconomique permettant de rejoindre en 2027 le niveau attendu de PIB potentiel repose sur des hypothèses favorables, avec un recul continu du taux d’épargne des ménages venant soutenir la consommation, le maintien à un niveau élevé du taux d’investissement des entreprises et une contribution positive du commerce extérieur.
43. Assise sur des hypothèses macroéconomiques que le Haut conseil estime ainsi optimistes, la trajectoire de solde public prévoit une décrue progressive du déficit, qui serait ramené à 2,7 points de PIB en 2027, un niveau légèrement amélioré par rapport à celui présenté en septembre 2022 alors que le poids de la charge d’intérêts est considérablement alourdi et que le taux de prélèvements obligatoires reste quasi identique à celui présenté alors. Ainsi, cette trajectoire suppose la réalisation d’importantes économies structurelles en dépenses dont le Gouvernement indique qu’elles ne pourront être précisées qu’à l’issue de l’exercice de revues de dépenses en cours.

3. Observations sur la programmation des finances publiques
1. Le scénario du Gouvernement

44. Le projet de loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027 révisé retient une trajectoire de déficit effectif identique à celle prévue par le programme de stabilité présenté en avril 2023. Le solde public effectif prévu à – 4,9 points de PIB en 2023 serait ramené progressivement à – 2,7 points de PIB en 2027. La trajectoire de solde structurel est également quasi identique à celle prévue dans le programme de stabilité, le déficit structurel étant légèrement plus creusé sur l’ensemble de la période (+ 0,1 point de PIB).

Tableau 1.- Trajectoire du solde effectif, conjoncturel et structurel entre 2023 et 2027

 

2023 2024 2025 2026 2027
Solde effectif (en % de PIB) -4,9 -4,4 -3,7 -3,2 -2,7
Solde conjoncturel (en % du PIB) -0,7 -0,6 -0,4 -0,2 0,0
Mesures ponctuelles et temporaires (en % de PIB potentiel) 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0
Solde structurel (en % de PIB potentiel) -4,1 -3,7 -3,3 -2,9 -2,7
Ajustement structurel 0,1 0,5 0,4 0,3 0,2

 

Source : projet de loi de programmation des finances publiques 2023-2027 révisé

2. La cohérence de la trajectoire de finances publiques au regard des engagements européens de la France

45. En mars 2020, la Commission européenne a déclenché la clause dérogatoire du Pacte de stabilité et de croissance en raison des circonstances exceptionnelles résultant de la crise sanitaire. Cette clause permet aux Etats membres de s’écarter des exigences budgétaires normalement applicables jusqu’à la fin de l’année 2023. Les règles budgétaires européennes devraient s’appliquer à nouveau à compter de 2024, leur réforme en cours devant toutefois aboutir prochainement.
46. Dans l’intervalle, les règles européennes antérieures, fixées par le Pacte de stabilité et de croissance et le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, continuent à s’appliquer.

 

La réforme des règles de gouvernance économique européenne
Aux termes du Pacte de stabilité et de croissance et du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance signé par la France en 2012, les Etats membres de l’Union européenne se sont engagés à se conformer à des règles budgétaires communes. Aux termes de ces règles, la situation budgétaire des Etats membres doit converger vers leur objectif de moyen terme (OMT), proche de l’équilibre structurel, en réduisant leur déficit structurel d’au moins 0,5 point de PIB par an, tant qu’ils n’ont pas atteint cet OMT. La coordination des politiques budgétaires repose sur le dépôt en avril par chaque Etat membre de son programme de stabilité, présentant notamment l’évolution du solde public, du ratio d’endettement et de la dépense publique sur les trois ans à venir. Les pays dont le ratio de dette est supérieur à 60 points de PIB doivent réduire d’1/20e par an l’écart entre ce taux et la valeur de référence de 60 %. Une procédure peut être déclenchée en cas de déficit excessif, pouvant en principe aller jusqu’à des sanctions financières.
En raison de la pandémie de Covid-19, la Commission européenne a déclenché en 2020 la clause dérogatoire du Pacte de stabilité et de croissance, qui permet aux Etats membres de s’écarter temporairement de ces exigences en raison de circonstances exceptionnelles. La Commission a annoncé qu’il serait mis fin à cette clause à la fin de l’année 2023 (4).
En parallèle, une réforme des règles de gouvernance économique européenne a été engagée, en raison de faiblesses intrinsèques identifiées avant la crise sanitaire (risque de procyclicité, illisibilité des règles, traitement trop uniforme des situations différentes des Etats membres, mise en œuvre insuffisante) ainsi que du niveau élevé des dettes publiques invitant à revoir les règles en vigueur de facto inadaptées pour nombre d’Etats membres.
La Commission a proposé des modifications de la législation européenne en ce sens en avril 2023, qui comprenaient les grandes évolutions suivantes :
– la surveillance européenne des politiques budgétaires reposerait principalement sur l’évolution de la dépense publique primaire nette des mesures nouvelles de prélèvements obligatoires (5) et non plus sur celle du solde structurel ;
– les Etats membres présenteraient une programmation de la croissance de la dépense publique nationale nette, cette trajectoire devant garantir, pour les pays les plus endettés, que le ratio de dette soit installé sur une pente durablement descendante au plus tard à la fin de la période d’ajustement ;
– ces plans de moyen terme, en principe de 4 ans, présenteraient également les réformes structurelles et les investissements publics envisagés, ceux-ci pouvant permettre d’en allonger la durée à 7 ans. Ils seraient proposés par chaque Etat membre, évalués par la Commission puis endossés par le Conseil ;
– la procédure pour déficit excessif en cas de dépassement de la valeur de référence de 3 % du PIB serait maintenue. Une procédure serait également engagée à l’encontre des Etats membres ayant une dette élevée et qui s’écarteraient de la trajectoire prévue dans leur plan de moyen terme. Les sanctions financières seraient rendues plus facilement applicables.
Ce projet de réforme de la Commission qui entend favoriser l’appropriation nationale comprend des dispositions visant à renforcer le rôle des instituts budgétaires indépendants nationaux, donc du HCFP en France. Ces derniers se verraient confier de nouvelles missions, en particulier en matière d’analyse de soutenabilité de la dette publique.
La Commission espère un accord au Conseil dans les prochains mois, sur des textes qui devraient toutefois comprendre certains aménagements par rapport à ses propositions initiales.

 

47. Le Haut Conseil avait souligné que le projet initial de loi de programmation des finances publiques présenté en septembre 2022 était peu ambitieux au regard des engagements européens de la France.
48. A cet égard, la situation de la France s’est dégradée au cours des dix dernières années en termes d’endettement relatif au sein de la zone euro. Elle fait désormais partie des six pays de la zone euro qui ont une dette supérieure à 100 points de PIB alors que douze d’entre eux ont une dette inférieure à 80 points de PIB. Selon la prévision du Gouvernement, très proche de celle présentée dans le programme de stabilité, le ratio de dette publique diminuerait de deux points en 2023 à 109,7 points de PIB, grâce à un solde stabilisant la dette inférieur de deux points au solde public, mais serait ensuite quasi stable de 2024 à 2026, avant de diminuer à nouveau en toute fin de période de programmation pour s’établir à 108,1 points de PIB en 2027. La trajectoire présentée ne suffira pas à enrayer l’érosion relative de la position d’endettement de la France au sein de la zone euro.
49. La trajectoire révisée par le Gouvernement est un peu plus volontariste que le projet initial, avec un déficit effectif en 2027 prévu à 2,7 points de PIB, au lieu de 2,9 points de PIB initialement. L’objectif de retour sous la limite européenne de 3 points de PIB n’est toutefois pas avancé dans le temps.
50. L’ajustement structurel prévu, c’est-à-dire la variation du solde structurel, serait de 0,5 point de PIB en 2024, s’expliquant principalement par l’extinction progressive des mesures de bouclier tarifaire et de soutien. Par la suite, l’ajustement structurel serait un peu moins important, se réduisant progressivement pour s’établir à seulement 0,2 point de PIB en 2027.

Graphique 4. – Solde structurel des administrations publiques (en % du PIB potentiel)

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Source : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 révisé
51. Le Haut Conseil observe que la trajectoire de finances publiques affichée par le projet de loi de programmation aboutit, après cinq années, à un déficit très éloigné de l’objectif de moyen terme fixé par le même projet de loi à -0,4 point de PIB. L’ajustement structurel programmé étant inférieur à 0,5 point de PIB par an, il n’apparaît pas de prime abord conforme aux dispositions européennes actuelles qui prévoient que les Etats membres présentant une dette supérieure à 60 points de PIB procèdent à un ajustement structurel annuel supérieur à 0,5 point de PIB jusqu’à atteindre leur objectif de moyen terme.

Graphique 5. – Trajectoires de dette publique en zone euro

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Source : Eurostat

3. L’appréciation du Haut Conseil

52. Selon le Gouvernement, les dépenses publiques hors crédits d’impôt diminueraient en volume en 2023 (- 1,3 %) (6) du fait de la réduction des mesures exceptionnelles liées à la hausse des prix de l’énergie et de l’extinction des dépenses de soutien pour faire face à la crise sanitaire. Une fois ces mesures neutralisées, les dépenses progresseraient en volume de 0,5 %.
53. Elles croîtraient ensuite moins rapidement que le PIB sur la période 2023-2027 (+ 0,6 % en volume en moyenne contre 1,6 %), ce qui permettrait au ratio de dépense de baisser de 2,1 points de PIB entre 2023 et 2027 et de retrouver son niveau de 2019 (53,8 %). Hors charges d’intérêts, elles seraient quasi stables en volume sur la période (+ 0,1 %), ce qui représente une trajectoire bien plus ambitieuse que celle réalisée par le passé (cf. graphique 6).

Graphique 6. – Taux de croissance de la dépense publique (hors charges d’intérêts) en volume

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Source : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 révisé
54. L’actualisation du projet de loi de programmation de finances publiques prévoit toujours un effort marqué de réduction des dépenses de l’Etat à moyen terme. En effet, les dépenses budgétaires incluses dans « le périmètre des dépenses de l’Etat (PDE) » progresseraient en valeur de 1,1 % en moyenne sur la période 2024-2027, soit une baisse de 0,9 % en volume sur la période. Des mouvements contraires seraient à l’œuvre dans cette évolution. Tout d’abord, des facteurs haussiers : les crédits de plusieurs missions budgétaires continueront à fortement augmenter, en application des lois de programmation sectorielles déjà votées ou en cours de discussion (militaire, justice, ministère de l’intérieur, recherche) ainsi que pour les besoins de la transition écologique. En conséquence, les dépenses de l’Etat entrant dans le PDE mais hors lois de programmation sectorielle nécessiteront un effort de maîtrise très important : elles devraient diminuer en volume en moyenne de 1,8 % pour respecter l’objectif global du PDE.

Graphique 7. – Evolution en volume des dépenses sous et hors lois de programmation sectorielles sur la période 2023-2027

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Source : PLPFP actualisé pour 2023-2027, calculs du secrétariat permanent du Haut Conseil
Note : l’évolution en volume a été calculée en utilisant l’indice des prix à la consommation hors tabac.
55. Cette maîtrise de la dépense reposerait également sur les collectivités locales, dont les dépenses de fonctionnement diminueraient en moyenne de 0,5 % par an sur la période 2024-2027. Si le Haut Conseil des finances publiques locales a été mis en place, aucun mécanisme contraignant n’a été instauré, contrairement à la précédente LPFP 2018-2022. Cette trajectoire fait de plus l’hypothèse d’une baisse de leurs investissements en 2026 et 2027 (années électorale et post-électorale), alors que la hausse des investissements engagés pour la transition écologique, soutenus par un fonds dédié, pourrait être moins sensible au cycle électoral.
56. Les dépenses des administrations de sécurité sociale augmenteraient en moyenne en volume de 0,8 % sur la période 2024-2027, soit un rythme inférieur à celui de l’activité. Ce scénario repose sur l’impact de la montée en charge progressive de la réforme des retraites promulguée au printemps, mais aussi sur une progression des dépenses sous Ondam limitée à 2,9 % en fin de période. Cette trajectoire ne laisse cependant pas apparaître de surcoût progressif lié aux dépenses de dépendance, malgré la hausse des besoins liés à la perte d’autonomie découlant du vieillissement de la population.
57. Le respect de la trajectoire suppose enfin la réalisation d’un montant important d’économies toujours peu documentées à ce jour : le Gouvernement escompte 12 Md€ d’économies pérennes en 2025, réparties entre l’Etat et la sphère sociale, issues de l’exercice de revues de dépenses en dépit du caractère décevant du premier exercice mené durant ce quinquennat, puis d’un même montant d’économies supplémentaires les années suivantes. L’absence de précision sur la nature de ces économies ne permet pas au Haut Conseil de juger le réalisme de la trajectoire de dépenses ni par ailleurs d’en apprécier les conséquences sur le scénario macroéconomique.

58. Après un record historique à 45,4 points de PIB en 2022, du fait d’une croissance spontanée des recettes très supérieure à celle de l’activité (élasticité de 1,6), le ratio de prélèvements obligatoires serait ramené à 44,0 points de PIB en 2023, les prélèvements à législation constante évoluant par contrecoup à un rythme très en deçà de celui du PIB (élasticité de 0,6) et les mesures nouvelles amputant les recettes à hauteur 4,0 Md€. En 2024, le ratio de prélèvements obligatoires serait quasi stable, à 44,1 points de PIB, avec une élasticité proche de l’unité et des mesures nouvelles de baisses nettes de prélèvements de 1,5 Md€. A partir de 2025, les recettes spontanées de prélèvements sont supposées augmenter au même rythme que l’activité. En 2025, le ratio de prélèvements obligatoires augmenterait toutefois de 0,3 point à 44,4 points de PIB sous l’effet essentiellement de la fin du bouclier tarifaire. Le ratio de prélèvements obligatoires serait ensuite stable en 2026 et 2027. Les tendances observées sur les prix des actifs, immobiliers en particulier, font toutefois peser un risque à la baisse sur les recettes de certains impôts (DMTO, DMTG, impôt sur la fortune immobilière…).

Graphique 8. – Evolution du ratio de prélèvements obligatoires entre 2022 et 2027 (en points de PIB)

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Source : projet de loi de programmation des finances publiques révisé pour les années 2023 à 2027, calculs du secrétariat permanent du HCFP

Graphique 9. – Solde public effectif (en % du PIB)

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Source : INSEE, lois de programmation précédentes, projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 révisé
59. Rapportée au PIB, la dette publique diminuerait de 3,7 points entre 2022 et 2027 pour s’établir à 108,1 points en 2027. Le Gouvernement a révisé ses objectifs par rapport à la première version du PLPFP dans le sens d’une meilleure prise en compte de l’impératif de désendettement. Toutefois, la réduction de l’endettement reste faible et ne suffira pas à améliorer la position relative de la France au sein de la zone euro, qui s’est dégradée au cours des dernières années. De plus, la baisse attendue est fragile, puisqu’elle s’appuie sur une prévision de croissance optimiste et une cible exigeante de dépenses, dont le respect n’est pas aujourd’hui assis sur des mesures concrètes.

Graphique 10. – Trajectoire de dette publique française réalisée et prévue (en points de PIB)

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Source : INSEE, projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 révisé
60. Assise sur des hypothèses macroéconomiques que le Haut Conseil estime optimistes, la trajectoire de solde public prévoit une décrue progressive du déficit, qui serait ramené à 2,7 points de PIB en 2027, un niveau légèrement amélioré par rapport à celui présenté en septembre 2022 alors que le poids de la charge d’intérêts est considérablement alourdi et que le taux de prélèvements obligatoires reste quasi identique à celui présenté alors. Ainsi, cette trajectoire suppose la réalisation d’importantes économies structurelles en dépenses dont le Gouvernement indique qu’elles ne pourront être précisées qu’à l’issue de l’exercice de revues de dépenses en cours.
61. Le Gouvernement a révisé ses objectifs de finances publiques à l’horizon de 2027 par rapport au projet présenté en septembre 2022 en faveur du désendettement sur lequel le Haut Conseil a maintes fois mis l’accent. Pour autant, la trajectoire présentée par le Gouvernement demeure peu ambitieuse au regard des engagements européens de la France. Le projet de loi de programmation ne prévoit pas de retour rapide vers l’objectif d’équilibre des finances publiques. Alors même que les hypothèses de croissance demeurent optimistes, l’inflexion modeste de la trajectoire de dette expose au risque d’une divergence accrue avec le reste de la zone euro.
62. Le Haut Conseil rappelle que le retour à des niveaux de dette garantissant à la France de disposer de marges de manœuvre suffisantes est nécessaire pour qu’elle soit en mesure de faire face à l’avenir à des chocs macroéconomiques ou financiers et aux besoins d’investissement public élevés que nécessite en particulier la transition écologique. Pour assurer la soutenabilité de ses finances publiques, la stratégie de prélèvements obligatoires affichée rend d’autant plus impérative la maîtrise de la dépense publique, les revues de dépenses en cours devant conduire à des économies effectives.

Le présent avis sera publié au Journal officiel de la République française et transmis au Parlement.

 

Annexe

Article

 

ANNEXE
SCÉNARIO MACROÉCONOMIQUE DU PROJET DE LOI PROGRAMMATION DES FINANCES PUBLIQUES RÉVISÉ 2023-2027

 

Principales hypothèses du scénario macroéconomique 2022-2027 (*)
2022 2023 2024 2025 2026 2027
PIB (*) 2,5 1,0 1,4 1,7 1,7 1,8
Déflateur de PIB 3,0 5,7 2,5 1,8 1,6 1,6
IPCHT 5,3 4,8 2,5 2,0 1,8 1,8
Emploi salarié (**) 3,3 1,3 0,5 1,1 1,4 1,4
SMPT (**) 5,6 5,3 3,1 2,3 2,0 2,0
Croissance potentielle 1,25 1,35 1,35 1,35 1,35 1,35
PIB potentiel (en Md€ 2010) 2 373 2 405 2 437 2 470 2 503 2 537
Écart de production (en % du PIB) -0,9 -1,2 -1,1 -0,8 -0,4 0,0

 

Note : Données exprimées en taux d’évolution annuelle, sauf précision contraire
(*) Données corrigées des jours ouvrables.
(**) Branches marchandes non-agricoles

Annexe

Article

 

ANNEXE 2
SCÉNARIO DE FINANCES PUBLIQUES DU PROJET DE LOI PROGRAMMATION DES FINANCES PUBLIQUES 2023-2027 RÉVISÉ

 

En % du PIB sauf mention contraire 2022 2023 2024 2025 2026 2027
Ensemble des administrations publiques
Solde structurel (1) (en points de PIB potentiel) -4,2 -4,1 -3,7 -3,3 -2,9 -2,7
Solde conjoncturel (2) -0,5 -0,7 -0,6 -0,4 -0,2 0,0
Solde des mesures ponctuelles et temporaires (3) (en points de PIB potentiel) -0,1 -0,1 -0,1 -0,1 0,0 0,0
Solde effectif (1+2+3) -4,8 -4,9 -4,4 -3,7 -3,2 -2,7
Dépense publique (hors CI) 57,7 55,9 55,3 55,0 54,4 53,8
Dépense publique (hors CI, en Md€) 1523 1575 1622 1668 1705 1744
Évolution de la dépense publique hors CI en volume (%) -1,1 -1,3 0,5 0,8 0,5 0,5
Agrégat des dépenses d’investissement (en Md€)
Evolution de l’agrégat de dépenses d’investissement en volume (%)
Taux de prélèvements obligatoires (y.c UE nets des CI) (1) 45,4 44,0 44,1 44,4 44,4 44,4
Dette au sens de Maastricht 111,8 109,7 109,7 109,6 109,1 108,1
État et organismes divers d’administration centrale
Solde -5,2 -5,4 -4,7 -4,3 -4,2 -4,1
Dépense publique (hors CI, en Md€) 625 631 639 658 678 696
Évolution de la dépense publique hors CI en volume (%) -0,1 -3,6 -1,4 1,9 1,5 1,2
Administrations publiques locales
Solde 0,0 -0,3 -0,3 -0,2 0,2 0,4
Dépense publique (hors CI, en Md€) 295 312 322 329 329 331
Évolution de la dépense publique hors CI en volume (%) 0,1 1,0 0,9 0,2 -1,9 -1,0
Administrations de sécurité sociales
Solde 0,4 0,7 0,6 0,7 0,9 1,0
Dépense publique (hors CI, en Md€) 704 730 761 779 798 817
Évolution de la dépense publique hors CI en volume (%) -2,4 -0,5 1,7 0,3 0,7 0,6

 

(1) Corrigé des effets du bouclier tarifaire, le taux de prélèvements obligatoires s’établirait à 45,6 % du PIB en 2022, puis 44,4 % du PIB de 2023 à 2027.

Date et signature(s)

Fait à Paris, le 22 septembre 2023.

Pour le Haut Conseil des finances publiques :
Le premier président de la Cour des comptes, président du Haut Conseil des finances publiques,
P. Moscovici


(1) L’avis n° HCFP-2022-5 relatif au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 du 21 septembre 2022 est consultable sur le site internet.
(2) La révision de l’écart de production résulte de la révision à la baisse de 0,5 % du niveau du PIB potentiel et de 0,3 % du niveau du PIB, due pour à 0,1 point aux révisions par l’INSEE de ses estimations de la croissance du PIB sur les années 2020 et 2021 et pour 0,2 point à l’erreur de prévision du Gouvernement pour 2022.
(3) Les observations relatives aux prévisions macroéconomiques du Gouvernement pour les années 2023 et 2024 seront présentées dans le détail dans l’avis n° 2023-8 sur le PLF et le PLFSS pour 2024, qui sera publié le 27 septembre.
(4) Communication de la Commission, Orientations pour la politique budgétaire pour 2024, 8 mars 2023, COM(2023) 141 final.
(5) Il s’agit de la dépense publique nette des charges d’intérêts de la dette, nette des mesures nouvelles de prélèvements obligatoires, et d’autres variables hors du contrôle du Gouvernement.
(6) Elles se replieraient davantage (- 2,2 %) en les déflatant par le déflateur du PIB, indice de prix plus pertinent pour l’analyse des finances publiques. A partir de 2024, les deux déflateurs sont proches si bien que le texte de l’avis ne donne que les chiffres déflatés par les prix à la consommation hors tabac.