🟦 Décret du 10 novembre 2022 favorisant le développement de l’assurance contre certains risques agricoles

Références

NOR : AGRT2226784D
ELI : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2022/11/10/AGRT2226784D/jo/texte
Alias : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2022/11/10/2022-1427/jo/texte
Source : JORF n°0263 du 13 novembre 2022, texte n° 10

En-tête

La Première ministre,
Sur le rapport du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et du numérique et du ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire,
Vu le règlement (UE) n° 2021/2115 du Parlement européen et du Conseil du 2 décembre 2021 établissant des règles régissant l’aide aux plans stratégiques devant être établis par les Etats membres dans le cadre de la politique agricole commune (plans stratégiques relevant de la PAC) et financés par le Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et par le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), et abrogeant les règlements (UE) n° 1305/2013 et (UE) n° 1307/2013 ;
Vu le règlement (UE) n° 2021/2116 du Parlement européen et du Conseil du 2 décembre 2021 relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune et abrogeant le règlement (UE) n° 1306/2013 ;
Vu le code des assurances ;
Vu le code rural et de la pêche maritime, notamment ses articles L. 361-4 et suivants ;
Vu la loi n° 2022-298 du 2 mars 2022 d’orientation relative à une meilleure diffusion de l’assurance récolte en agriculture et portant réforme des outils de gestion des risques climatiques en agriculture ;
Vu l’avis du Comité national de gestion des risques en agriculture en date du 30 septembre 2022 ;
Vu l’avis du comité consultatif de la législation et de la règlementation financières en date du 7 octobre 2022,
Décrète :

Chapitre 1er : Fixant au titre des années couvertes par la programmation du Fonds européen agricole pour le développement rural débutant en 2023 et jusqu’à son terme les modalités d’application de l’article L. 361-4 du code rural et de la pêche maritime

Article 1

En application de l’article 76 du règlement (UE) n° 2021/2115 du Parlement européen et du Conseil du 2 décembre 2021 susvisé, les exploitants agricoles peuvent obtenir, au titre des années couvertes par la programmation du Fonds européen agricole pour le développement rural débutant en 2023 et jusqu’à son terme, la prise en charge d’une fraction des primes ou cotisations afférentes à la couverture d’assurance qu’ils souscrivent pour leurs récoltes de l’année.
Cette prise en charge prend la forme d’une subvention financée par des crédits issus du Fonds européen agricole pour le développement rural ou de la deuxième section du fonds national de gestion des risques prévu à l’article L. 361-1 du code rural et de la pêche maritime, calculée en pourcentage du montant de la prime ou cotisation éligible et versée directement à l’agriculteur concerné.
Le bénéficiaire final doit être un agriculteur actif.
La couverture d’assurance mentionnée au premier alinéa, ci-après dénommée « contrat », garantit au moins la prise en charge des sinistres occasionnés par les phénomènes climatiques défavorables suivants : sécheresse, excès de température, coup de chaleur, coup de soleil, températures basses, manque de rayonnement solaire, coup de froid, gel, excès d’eau, pluies violentes, pluies torrentielles, humidité excessive, grêle, poids de la neige ou du givre, tempête, tourbillon, vent de sable.
Elle peut avoir été souscrite selon des modalités définies par un contrat cadre collectif, dès lors que les garanties et la prime afférente de chaque exploitant sont clairement identifiées, que le montant de la prime est acquitté par chaque exploitant, et que le versement des indemnités compensatoires en cas de sinistre soit réalisé par l’entreprise d’assurance auprès de chaque exploitant.
Un arrêté des ministres chargés de l’agriculture, de l’économie et du budget fixe les critères de reconnaissance des phénomènes mentionnés au troisième alinéa dont la couverture d’assurance donne lieu à la prise en charge prévue au premier alinéa.

Article 2

I. – Peuvent seuls faire l’objet de la prise en charge prévue à l’article 1er les contrats dits « par groupe de cultures » ou « à l’exploitation ».
II. – Pour l’application du I, constitue un contrat « par groupe de cultures » le contrat qui prévoit que pour chaque nature de récolte couverte, l’assuré n’est indemnisé que si la perte de production pour cette nature de récolte est supérieure ou égale à un seuil de déclenchement exprimé en pourcentage de la production assurée. La production assurée ne peut être supérieure à la production annuelle moyenne de l’agriculteur au cours des trois années précédentes ou à sa production moyenne triennale calculée sur la base des cinq années précédentes, en excluant la valeur la plus élevée et la valeur la plus faible.
Avant la date mentionnée à l’article 12, les groupes de cultures sont les suivants :

– grandes cultures, cultures industrielles, légumes et horticulture ;
– viticulture ;
– arboriculture ;
– prairies.

Avant la même date, le contrat par groupe de culture assure au minimum 95 % des superficies des natures de récolte en production comprises dans le périmètre de couverture obligatoire et relevant du groupe de cultures concerné. Toutefois, pour le groupe de culture « grandes cultures, cultures industrielles, légumes et horticulture », ce taux de couverture est fixé à 70 % minimum de la superficie des natures de récolte en production comprises dans le périmètre de couverture obligatoire. Le périmètre de couverture obligatoire est défini dans le cahier des charges prévu à l’article 9.
Après la date mentionnée à l’article 12, les groupes de cultures sont les suivants :

– grandes cultures, cultures industrielles, légumes (hors maraîchage diversifié) ;
– viticulture ;
– arboriculture et petits fruits ;
– prairies ;
– plantes à parfum, aromatiques et médicinales ;
– autres productions dont maraîchage diversifié, horticulture, pépinières, apiculture, aquaculture, héliciculture.

Après la même date, le contrat par groupe de cultures assure au minimum 95 % des superficies des natures de récolte en production comprises dans le périmètre de couverture obligatoire et relevant du groupe de cultures concerné. Toutefois, pour le groupe de culture « grandes cultures, cultures industrielles, légumes (hors maraîchage diversifié) », ce taux de couverture est fixé à 70 % minimum de la superficie des natures de récolte en production comprises dans le périmètre de couverture obligatoire. Le périmètre de couverture obligatoire est défini dans le cahier des charges prévu à l’article 9.
III. – Pour l’application du I, constitue un contrat à l’exploitation le contrat qui assure au moins 80 % de la superficie en cultures de vente de l’exploitation, définie comme la surface agricole utile diminuée des surfaces en prairies et des surfaces en jachères, et au moins deux natures de récolte différentes. Il prévoit que sur les natures de récoltes garanties, l’assuré n’est indemnisé que si la perte de production est supérieure ou égale à un seuil de déclenchement exprimé en pourcentage de la production assurée. Cette production assurée ne peut être supérieure à la production annuelle moyenne de l’agriculteur au cours des trois années précédentes ou à sa production moyenne triennale calculée sur la base des cinq années précédentes, en excluant la valeur la plus élevée et la valeur la plus faible.
Le contrat mentionne le montant des primes ou cotisations par nature de récolte couverte.
IV. – Le calcul des taux de couverture mentionnés au II prend en compte l’ensemble des contrats subventionnables souscrits par le bénéficiaire, le cas échéant auprès de différentes entreprises d’assurance.
V. – Avant la date mentionnée à l’article 12, les contrats par groupe de culture mentionnés au II du présent article respectent les seuils de déclenchement suivants :

– pour le groupe « grandes cultures, cultures industrielles, légumes et horticulture », les seuils de déclenchement doivent être compris entre 20 % et 40 % ;
– pour le groupe « viticulture », les seuils de déclenchement doivent être compris entre 20 % et 40 % ;
– pour le groupe « arboriculture », les seuils de déclenchement doivent être compris entre 20 % et 25 % ;
– pour le groupe « prairies », les seuils de déclenchement doivent être compris entre 20 % et 25 %.

Après la date mentionnée à l’article 12, les contrats définis au II respectent, pour les récoltes 2023, 2024 et 2025, un seuil de déclenchement compris entre 20 % et un pourcentage de 5 points inférieurs au seuil de déclenchement de l’indemnisation mentionnée à l’article L. 361-4-2 du code rural et de la pêche maritime prévu à l’article 10.
Après la même date, par dérogation, pour les groupes de cultures « grandes cultures, cultures industrielles, légumes (hors maraîchage diversifié) » et « viticulture », ce seuil de déclenchement doit être compris entre 20 % et 40 %.
VI. – Les contrats à l’exploitation définis au III respectent un seuil de déclenchement compris entre 20 % et 25 %.

Article 3

Pour les prairies, les contrats mentionnés à l’article 1er prévoient le recours à des indices pour le calcul de la production fourragère annuelle de la sole assurée. Seuls les contrats utilisant des indices approuvés par le ministre chargé de l’agriculture peuvent bénéficier de la prise en charge prévue par le présent décret.

Article 4

La prise en charge prévue au premier alinéa de l’article 1er est fixée pour un niveau de garantie couvrant les pertes de quantité, et certaines pertes de qualité dans des conditions définies par le cahier des charges mentionné à l’article 9, caractérisé par une franchise, un rendement assuré et par un prix assuré définis comme suit :
1° La franchise exprimée en pourcentage de la production garantie, est déduite de la perte de production constatée pour calculer la perte de production ouvrant droit aux indemnités compensatoires en cas de sinistre. Cette franchise est égale au seuil de déclenchement prévu dans le contrat dans les conditions définies à l’article 2.
2° Le rendement assuré est inférieur ou égal au rendement historique, défini, au choix de l’exploitant, comme le rendement moyen triennal calculé sur la base des cinq années précédentes, en excluant la valeur la plus élevée et la valeur la plus faible ou comme le rendement moyen calculé sur la base des trois années précédentes. Les conditions dans lesquelles le rendement assuré peut être inférieur au rendement historique sont définies par le cahier des charges mentionné à l’article 9.
3° Le prix assuré est défini par référence à la valeur du barème de prix ou, en l’absence de valeur au barème, dans la limite du prix de vente réel, tels que définis par le cahier des charges mentionné à l’article 9.

Article 5

Le montant de la prime ou cotisation subventionnable est celui de la prime ou cotisation d’assurance afférente aux contrats définis à l’article 2.
Le montant de la prime ou cotisation éligible est la part de la prime ou cotisation subventionnable acquittée à l’assureur au plus tard le 31 octobre de l’année de récolte, nette d’impôts et de taxes.
Si l’exploitant a souscrit une extension de contrat qui n’est pas éligible à la prise en charge mentionnée à l’article 1er, figurant notamment au cahier des charges mentionné à l’article 9 ou que le montant acquitté au 31 octobre de l’année au titre de laquelle le contrat a été souscrit est inférieur au montant total de la prime ou cotisation afférente au contrat et à son extension, la prime ou cotisation éligible est égale au montant effectivement acquitté, réduit du taux que représente le montant de la prime ou cotisation afférente à l’extension dans le montant total de la prime ou cotisation afférente au contrat et à son extension.

Article 6

Avant la date mentionnée à l’article 12, le taux de prise en charge des primes ou cotisations éligibles mentionnée à l’article 1er est fixé par arrêté des ministres chargés de l’agriculture, de l’économie et du budget.
A compter de la date mentionnée à l’article 12, le taux de prise en charge des primes ou cotisations d’assurance éligibles mentionnée à l’article 1er est de 70 % pour les récoltes 2023, 2024 et 2025, pour les contrats par groupe de culture et pour les contrats à l’exploitation définis à l’article 2.

Article 7

La souscription des contrats d’assurance susceptibles de faire l’objet de la prise en charge prévue par l’article 1er et des extensions mentionnées à l’article 5 ne peut faire l’objet d’aucune autre aide financée par des crédits provenant des collectivités territoriales.
En cas de non-respect de cette obligation, les subventions versées sont intégralement remboursées.

Article 8

Peuvent bénéficier de la prise en charge prévue à l’article 1er les exploitants ayant effectué leur demande dans le cadre de la demande unique mentionnée à l’article D. 615-1 du code rural et de la pêche maritime de l’année au titre de laquelle le contrat a été souscrit et ayant transmis au plus tard le 30 novembre un formulaire de déclaration de contrat cosigné par l’entreprise d’assurance répondant aux caractéristiques fixées par le cahier des charges mentionné à l’article 9. L’administration peut contrôler, sur pièce et sur place, le respect des engagements et des conditions d’éligibilité prévues par le présent décret.

Article 9

Les entreprises qui distribuent les contrats susceptibles de faire l’objet de la prise en charge prévue à l’article 1er respectent un cahier des charges défini par arrêté des ministres chargés de l’agriculture et de l’économie qui fixe notamment le barème de prix mentionné à l’article 4, les données que les entreprises d’assurance s’engagent à leur fournir, les informations qu’elles s’engagent à fournir aux assurés et les modalités de contrôle des conditions dans lesquelles elles mettent en œuvre les dispositions du présent décret.
A compter de la date mentionnée à l’article 12, le cahier des charges correspond à celui mentionné à l’article L. 361-4-1 du code rural et de la pêche maritime.

Chapitre 2 : Indemnisation fondée sur la solidarité nationale

Article 10

I. – L’indemnisation fondée sur la solidarité nationale mentionnée à l’article L. 361-4-2 du code rural et de la pêche maritime est due lorsque la perte de récolte ou de culture, résultant d’aléas climatiques mentionnés à l’article 1er, pour chaque nature de récolte, est supérieure ou égale à un seuil de déclenchement exprimé en pourcentage de la production historique, qui ne peut être supérieure à la production annuelle moyenne de l’agriculteur au cours des trois années précédentes ou à sa production moyenne triennale calculée sur la base des cinq années précédentes, en excluant la valeur la plus élevée et la valeur la plus faible.
Les valeurs de ce seuil de déclenchement en fonction du groupe de culture considéré, tel que défini à l’article 2, sont définies dans le tableau annexé au présent décret.
II. – Le montant des pertes est calculé pour chaque nature de récolte pour un niveau de garantie couvrant les pertes de quantité, et certaines pertes de qualité dans les conditions prévues par le cahier des charges mentionné à l’article L. 361-4-1 du code rural et de la pêche maritime, caractérisé notamment par une franchise, un rendement assuré et par un prix assuré, tels que définis à l’article 4.
Pour les natures de récolte assurées au titre de contrats bénéficiant de l’aide mentionnée à l’article L. 361-4 du même code, le calcul du seuil de pertes de récolte prévu au I est fixé en fonction du prix assuré dans la limite de 100 % du barème « socle » du cahier des charges susmentionné.
Pour les natures de récolte qui ne sont pas assurées au titre de tout autre contrat couvrant les pertes visées au I, le calcul du seuil de pertes de récolte prévu au I est fixé pour un niveau de garantie caractérisé par un prix fixé à 100 % du barème « socle » du cahier des charges susmentionné.
Pour les natures de récolte pour lesquelles il n’y a pas de valeurs au barème, le cahier des charges susmentionné prévoit les modalités de calcul du seuil de pertes de récolte prévu au I.
III. – Pour les natures de récolte assurées au titre de contrats bénéficiant de l’aide mentionnée à l’article L. 361-4 du même code, le taux d’indemnisation fondée sur la solidarité nationale est fixé à 90 % du montant calculé au II.
Pour les natures de récolte qui ne sont pas assurées au titre de tout autre contrat couvrant les pertes visées au I, le taux d’indemnisation fondée sur la solidarité nationale est fixé dans le tableau annexé au présent décret.
IV. – Pour les contrats à l’exploitations mentionnés au III de l’article 2, les seuils et taux mentionnés ci-dessus sont fixés par arrêté des ministres chargés de l’agriculture, de l’économie et du budget.

Chapitre 3 : Dispositions finales

Article 11

Lorsque les dépenses dépassent un montant annuel de 680 millions d’euros, les modalités de financement du dispositif sont susceptibles d’être modifiées, notamment en révisant, pour la période restant à courir de la période 2023 à 2025, les seuils et taux applicables à compter de la date mentionnée à l’article 12, fixés par le présent décret, par arrêté des ministres chargés de l’agriculture, de l’économie et du budget.

Article 12

Le chapitre 2 du présent décret entre en vigueur à la date et selon les modalités prévues par l’article 17 de la loi n° 2022-298 du 2 mars 2022 d’orientation relative à une meilleure diffusion de l’assurance récolte en agriculture et portant réforme des outils de gestion des risques climatiques en agriculture.

Article 13

Le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire et le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Annexe

ANNEXE

Le tableau de paramètres ci-dessous concerne l’indemnisation mentionnée à l’article 10 du présent décret, en fonction des groupes de cultures auxquels les natures de récolte appartiennent.

Groupes de cultures tels que définis à l’article 2 Récoltes 2023, 2024 et 2025
Seuil de déclenchement

mentionné au I de l’article 10

Taux mentionné au III de l’article 10

pour les natures de récolte non assurée

au titre d’un contrat d’assurance

Grandes cultures, cultures industrielles, légumes (hors maraîchage diversifié) 50 % 45 % pour 2023
40 % pour 2024
35 % pour 2025
Viticulture 50 %
Arboriculture dont petits fruits 30 %
Prairies 30 %
Plantes à parfum, aromatiques et médicinales 30 % 45 %
Autres productions (*) 30 %

 

(*) Autres productions dont maraîchage diversifié, horticulture, pépinières, apiculture, aquaculture, héliciculture, pour lesquelles il n’y a aucun contrat d’assurance récolte en 2022. La liste des productions concernées sera précisée à travers le cahier des charges mentionné à l’article L. 361-4-1 du code rural et de la pêche maritime.

Date et signature(s)

Fait le 10 novembre 2022.

Élisabeth Borne
Par la Première ministre :

Le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire,
Marc Fesneau

Le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique,
Bruno Le Maire

Le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics,
Gabriel Attal